lundi 23 janvier 2012

GRENOBLE AU CŒUR DE LA GLISSE

Je n'apprendrai rien à personne en affirmant que Grenoble est une vraie capitale. Celle des Alpes, entourée tout l'hiver de sommets enneigés. Intelligente, cultivée et peuplée d'industries de très haut niveau, elle attire en grand nombre des ingénieurs pointus qui adorent se rafraîchir la tête en dévalant les pistes dès qu'ils en ont la possibilité.

Certains stations, comme le Sappey en Chartreuse ou encore Chamrousse, celles du Vercors et quelques autres, sont à 1/2 heure, voire 1/4 d'heure du centre ville. Et pour ne pas perdre la main, les Grenoblois disposent même d'un téléphérique urbain qui leur permet d'évaluer la situation en prenant de la hauteur. La ville qui a organisé les Jeux Olympiques en 1968 attire donc du beau monde et des vacanciers de toute la France et toute l'Europe. Des Britanniques en tout premier lieu, suivis des Belges et des Néerlandais.

A l'exception de stations géantes et performantes comme l'Alpe d'Huez, baptisée "l'Ile au soleil" et Les Deux Alpes et son glacier, le ski en hiver est plutôt familial, donc relativement bon marché, les stations très villages mais les hauts sommets toutefois escarpés.

Et si la grande rivalité entres les massifs français s'exerce entre les Alpes qui raflent la mise et les domaines plus secondaires comme les Pyrénées, le Jura, l'Auvergne et les Vosges (la plate Picardie parle aussi de sports d'hiver avec le char à voile qui se pratique de préférence quand souffle la bise!), il n'empêche que les Alpes du Sud, l'Isère et les Savoie ne lâchent jamais l'affaire et tentent de se surpasser entre elles.

Car si les Savoyards, ont admis de se réunir en un même Savoie Mont Blanc mais continuent à prétendre qu'il y a une vraie différence d'authenticité entre les deux départements, l'Isère et ses 22 stations, elles, les ignorent le plus souvent avec superbe. Elles ne participent, par exemple, jamais à l'étude qui a lieu 2 fois par an en Rhône-Alpes sur les projets et leurs résultats de fréquentation. Au pays de Stendhal et Berlioz, on préfère faire bande à part!

En dehors du massif des Alpes et de Killy qui a raflé les médailles en 68 et orchestré les Jeux d'Albertville en 92, il n'y a guère de points communs entre elles. Et toute seule, l'Isère se défend bien. Tout d'abord elle se met en 4. Quatre massifs qui enserrent la ville et lui offrent des terrains de jeux très différents.

La Chartreuse et ses forêts, idéale pour les amateurs de nature et les débutants qui sont certains de ne pas se faire bousculer sur des pistes sur lesquelles les fous de glisse ne s'aventureraient jamais. Comme sur le plateau des Petites Roches, le Col de Marcieu et le col de Porte. Et des stations comme Saint Pierre de Chartreuse, le paradis des fondeurs.

Le Vercors qui s'étire entre la Drôme et l'Isère est un Parc Naturel Régional dont les amoureux des grands espaces enneigés, du ski nordique et autres spécialités de longue haleine raffolent. Autrans, est un des plus beaux domaines de ski de fond d'Europe et Villard de Lans la plus importante station du Vercors attire tous les connaisseurs amateurs de grandes étendues de neige vierge.

De Chamrousse dans le massif de Belledonne, on aperçoit Grenoble et ses lumières juste en bas quand la nuit tombe. La station qui avait un peu marqué le pas après les JO retrouve un certain tonus et multiplie les initiatives avec de nouveaux hébergements et de nouvelles structures. Le Collet d'Allevard perché à près de 1500m est un des plus grands domaines d'Europe de ski nocturne.

L'Oisans enfin, mais dans un autre genre, fait la part belle au grand ski avec l'Alpe d'Huez, ses 8000 mètres de grandes descentes et la fameuse piste de la Sarenne, que tout ce qui aime les émotions fortes connaît, et les 2 Alpes, qui propose aux amateurs de glisse à la recherche de sensations, de découvrir le ski de randonnée, baptisé aussi ski d'alpinisme. Les guides de la station équipent le groupe de peaux de phoque (il s'agit en fait de mohair qui agrippe aussi bien que les peaux autrefois et laisse tranquilles les animaux). La remontée se fait sous les étoiles à la frontale pendant 450m et dure 1h30 environ. Ensuite, après la pause au restaurant d’altitude La Troïka à 2090m, les peaux sont retirées des skis et on rejoint la station en douceur.

A l'Alpe du Grand Serre, on s'exerce au ski de couloirs (très évocateur) et on peut aussi, dans tout le massif de l'Oisans, tenter l’expérience « Grand Nord » façon esquimaux et passer une nuit sous igloo après une marche de 3 heures dans la montagne sauvage. On construit alors son abri et on apprend qu'il existe plusieurs sortes de maisons en glace. Celle que l'on bâti en parpaings de neige et celle que l'on creuse dans un mur de neige. Le repas montagnard est prévu mais il faut, on l'aura compris, une bonne condition physique pour participer à l'aventure.

Ces grandes stations, qui rivalisent d'ingéniosité tout l'hiver, échangent le ski contre le VTT dès la fonte des neiges avec, en prime aux 2 Alpes, le ski sur le glacier pendant tout l'été. Elles n'ont rien à envier aux grandes stations de Tarentaise. D'autant que leurs vastes domaines skiables sont reliés à de petites stations familiales qui ont moins de 25 ans d'âge (ce qui, de nos jours représente à peine l'âge de raison...) comme Oz-en-Oisans qui s'est fait, pour fêter son anniversaire, une spécialité des descentes aux flambeaux et dîner tous ensemble au gîte le Sardonnier. Ou encore l'escarpée Vaujany avec ses grimpettes et ses escaliers.

Toujours dans le même domaine les vrais villages comme Venosc ou encore Auris-en Oisans enchantent les amateurs d'authenticité en totale rupture avec le monde de la haute montagne et des glaciers de La Grave - La Meije pourtant tout près de là.

Evidemment, ici comme ailleurs en montagne, les événements comme l'Aventure Polaire et ses 100 attelages de chiens de traîneaux à Méaudre dans le Vercors les 28 et 29 janvier; la traversée du Vercors les 3 et 4 mars ou encore le Canicross à Auris en Oisans le 13 mars, ont mission d'attirer les touristes en dehors des périodes consacrées des vacances scolaires. Exactement le moment où il faut s'y rendre si on en a la possibilité. C'est mieux et c'est moins cher!

mercredi 4 janvier 2012

LA TAILLE DES GENTIANES...

Chaque année, au moment où les professionnels de la montagne se rongent les sangs en attendant la neige et que tous les amateurs de sports d'hiver en font autant à l'idée de devoir se passer de ski si l'or blanc ne tombe, tout le monde donne son avis sur la question. Tout y passe, le réchauffement climatique, les cycles de 30 ans - 3 décennies avec neige, 3 décennies sans neige - et les dictons des anciens, pour lesquels autrefois, des chutes de neige abondantes, c'était surtout des tracas en perspective.

C'est ainsi que la Fifine à Séez en Haute Tarentaise assure chaque année que "neige à la Saint Michel ne reste pas au ciel " et que les faits lui donnent souvent raison. Sauf que la Saint Michel, c'est le 29 septembre et que, cette année, on aurait facilement pu laisser les bêtes aux alpages, tant le temps était doux et l'herbe abondante. Mais les anciens ne sont pas sans ressources. Les vieux Savoyards ont constaté cette année que les gentianes étaient hautes. Et, dans ces cas-là, cela signifie que les plantes se préparent pour affronter de fortes hauteurs de neige.

Sauf que, fin novembre, en station, plus personne n'y croyait plus. Hommes de peu de foi, comme on dit dans les Evangiles! Une fois de plus, les vieux avaient raison et, de la neige, il y en aurait plutôt trop. Au point que certaines compétitions de ski, qui risquaient d'être annulées par manque de neige, l'ont été à cause des excès de poudreuse. La nature est rebelle.

Toujours est-il, qu'en ce début janvier, à l'occasion duquel je vous souhaite d'ailleurs une très bonne année, les perspectives en montagne sont excellentes et les fêtes se sont bien passées. Sous la neige, qui avait eu la bonté de tomber juste avant et de régaler les touristes qui ont connu l'allégresse du stationnement sur les aires de chaînage dans les montées.

Il vaut mieux, car on s'est bien bougé dans les Alpes. Montée en gamme des hôtels avec de nouvelles étoiles qui récompensent les aménagements, installations de Spas et d'espaces aqualudiques ouverts à tous à Morzine, les Arcs et Montchavin les Coches. Ce qui est sympa si l'on est en location sans infrastructures complémentaires, mais ne vaut pas le Spa privé que l'on peut rejoindre en peignoir par l'ascenseur de l'hôtel.

On l'a déjà dit ici, c'est la grande reconquête des débutants dans les Alpes. Parce que la course à la performance et les nouvelles glisses très sportives ne concernent finalement qu'un public restreint et que les néophytes, même pas tout jeunes, peuvent très bien galérer en chasse-neige et rater le fameux planté de bâton, mais se révéler des clients en or pour les palaces. On a des exemples: Madonna qui apprend le ski à 53 ans et Kate Moss qui a décomplexé tout le monde l'an passé à Courchevel.

Gloire aux débutants donc avec You Can Ski dans les stations des Portes du Soleil du 3 au 5 février. Ils ont les pistes pratiquement pour eux tout seuls et à peu près partout, on chouchoute tous ceux qui n'ont jamais osé chausser. Mieux encore, à Avoriaz, ils bénéficient d'un coach "spécial débutant " dans tous les magasins de sport.

L'idéal tout de même étant de les prendre au berceau. Les familles sont très sérieusement prises en chasse par le marketing blanc. Avec certaines initiatives rigolotes comme les "soirées pyjama " à l'Etoile des Cimes à Sainte-Foy Tarentaise. Les écoles de ski et autres Jardins des Neiges rivalisent d'ingéniosité pour attirer les petits dés l'âge de la maternelle. Il m'est arrivé parfois de me demander ce que ça leur faisait de passer de l'école du quartier à une autre école qui applique à peu près le même genre de méthodes avec certes, des activités différentes. Ça ne doit quand même pas leur plaire à tous, même si c'est censé leur faire plaisir. La preuve, on en voit qui pleurent...

Le ski nordique, réputé moins compliqué (mais réputé seulement...) reprend du poil de la bête et a cessé d'être un sport de papy. Jusqu'au 10 mars avec les Rondes Nocturnes qui entraînent les amateurs, qu'ils soient chevronnés ou débutants. Et avec Festi'Nordic jusqu'au 5 février qui rassemble 6 stations pour une journée de découverte des activités nordiques.

La raquette elle aussi a de beaux jours devant elle. Les amateurs de nature, de paysages grandioses et de traces d'animaux en raffolent. Y compris pour rejoindre restaurants d'altitude et tables d'hôtes à la frontale et redescente itou. Le 15 janvier avec la Fête de la Raquette à Neige, elle est à l'honneur dans de nombreuses stations. Penser à chausser des bottes bon marché. La mâchoire des raquettes décollera avec une redoutable efficacité la semelle de vos après-skis de luxe tout comme celle des autres.

Evidemment les initiatives insolites sont de plus en plus nombreuses. On passe une nuit sous les étoiles dans une bulle de verre à Combloux face au Mont Blanc. On se lance dans la pente d'une piste de luge dédiée de 6 km et on pratique le VTT sur neige à Val Thorens. On pratique les cours de ski au coucher du soleil avec les Sunset Lesson et si on explore, pour les proposer à la carte, toutes les façons de glisser, on sait aussi qu'une proportion non négligeable des personnes qui séjournent en montagne l'hiver ne pratiquent pas le ski. Principalement les accompagnants auxquels il s'agit de proposer autre chose que la pause thé au bistrot en attendant que les fondus de la descente rentrent au bercail.

En revanche, et comme me le disait l'an passé un directeur d'Office de Tourisme, il ne faut pas oublier que le gros des investissements des communes de montagne se fait sur les remontées mécaniques et qu'il est indispensable qu'elles tournent et vendent du forfait. Les hébergements étant eux, des investissements privés. Avec 4 mois d'hiver pour rentabiliser les infrastructures, il n'y a pas de temps à perdre! Ce que l'on pourrait résumer par "Le tout ski, c'est fini, mais sans le ski, tout est fini! "

Pas question bien entendu de lister ici toutes les initiatives prises en vue d'un hiver prometteur. Voici, pour suivre, un florilège d'entre elles dans les stations les plus punchy pour lesquelles il arrive aussi que cette année fasse date. Comme à Val Thorens, station la plus haute d'Europe, qui fête ses 40 ans et dont le domaine skiable est à plus de 2000m dans sa presque totalité.

C'est là-haut que Jean Sulpice, le chef doué et télégénique de l'Oxalys fête ses 10 ans au sommet en invitant plusieurs de ses confrères à ses fourneaux au fil de l'hiver. Jacques Marcon, Mauro Colagreco du Mirazur à Menton ou encore Christophe Aribert des Terrasses d'Uriage profitent de la basse saison de leur établissement pour découvrir que l'eau ne bout pas à 100° à 2000m et qu'il leur faut réaménager toutes leurs recettes. L'événement de l'année, c'est l'ouverture de "l'Altapura ", dernier né du groupe Sibuet. Un 4 étoiles équipé d'un Spa qui a pris la clientèle des jeunes actifs sportifs et aisés en ligne de mire.

Ce qui est très intéressant aussi dans les stations, c'est la montée en gamme des services des 3 étoiles et le développement des maisons et tables d'hôtes tous azimuts. A Chamonix, l'hôtel Faucigny en plein coeur de la capitale de l'alpinisme a été délicieusement rénové et propose, du coup des tarifs évidemment plus accessibles que les palaces de Courchevel.

On en profite alors pour découvrir la nouvelle exposition interactive installée à l'Espace Alpinisme qui permet de vivre la haute montagne comme si on y était, mais avec aucun risque de devoir recourir aux services du PGHM (Peloton de Gendarmerie de Haute Montagne). La visite commence dans un refuge reconstitué, invite ensuite le visiteur à manipuler en 3D le Mont Blanc, l'Eiger, les Drus, les Grandes Jorasses et le Cervin; continue par le spectacle de films d'expéditions mythiques dans un décor de camp de base et la possibilité de tester le premier simulateur d'escalade et la sensation de "gaz" (le vide...) en 3D. Petit casse-croûte ensuite chez l'excellent Mickey Bourdillat du Café de l'Arve qui s'attache à élaborer la carte de son restaurant à partir de produits locaux. Tout ça pour dire aussi que Chamonix, longtemps à la remorque des grandes stations de sports d'hiver, a bien remonté la pente et joue désormais, elle aussi, dans la cour des grandes.

Alors même que les établissements de luxe se déploient dans les Alpes avec l'ouverture d'un nouveau Club Méd à Valmorel, de bienheureuses initiatives occupent le terrain délaissé par tous les investisseurs qui ne jurent que par le haut de gamme. C'est ainsi que les Menuires, la station la moins "chic" des Trois Vallées et qui bénéficie néanmoins d'un excellent domaine skiable voit s'installer en lieu et place de l'ancien Club Med Reberty 2000, un Village Club du Soleil qui fait la joie des familles et n'hésite pas, à proposer week-ends et courts séjours (quand c'est possible) avec des structures qui accueillent ce qui était autrefois la clientèle des 2 ou 3 tridents du temps de Trigano. Il rejoint en cela, Belambra dont la résidence avec espace forme fait partie des établissements de nouvelle génération du groupe. Même si des hôtels 4 étoiles et éco-responsables se sont installés dans la station et si le village de Saint Martin de Belleville donne à la vallée une version charme que l'on ne trouve pas plus haut.

Cette année, le calendrier des manifestations est chargé. Avec la Grande Odyssée du 7 au 18 janvier , le concours de Sculptures sur Glace et Neige à Valloire du 17 au 20 janvier et du 24 au 27 janvier. En attendant le Rock the Pistes Festival des Portes du Soleil du 24 au 28 mars et le Festival Jazz Up à Avoriaz du 31 mars au 6 avril. Avec, en point d'orgue, la célébration de l'anniversaire des 20 ans des JO le 8 février à Albertville et le 14 février à Val d'Isère. Ce qui ne consolera sans doute pas Annecy d'avoir raté les siens...