vendredi 14 décembre 2012

CROISIÈRES ET AUTRES RÉJOUISSANCES DE NOËL

Quand il est question de croisière, nombreux sont ceux qui ont les yeux qui brillent, car, malgré les avanies (avaries aussi) essuyées par les paquebots Costa, le moins que l'on puisse dire, c'est que personne, parmi les amateurs, ne semble se décourager. D'autres, dont j'ai tendance à faire partie, sont plus méfiants. Crainte de la promiscuité avec une clientèle un peu, disons, uniforme. Erreur sur toute la ligne, les croisières de CroisiEurope ont tout bon!

Le mieux était encore d'essayer. Et il fallait oser quand on est, comme ceux qui y sont allés, des habitués du Club Méd II et des palaces davantage que des villages de tente. Pour une somme d'environ 500 euros, l'aventure a commencé à Strasbourg et s'est poursuivie le long du Rhin dans les vignes alsaciennes et les villages de Forêt Noire à la découverte des marchés de Noël et de la relation si particulière des villes et des pays de l'Est avec les célébrations de la fin de l'année. Accueil impeccable, cabines spacieuses, clientèle discrète et raffinée et cuisine de qualité. La choucroute suivie de son munster au cumin et d'une forêt noire était meilleure qu'à la Maison Kammerzel (pas difficile…), les petits déjeuners buffet étaient copieux et savoureux. Bref que du bonheur.

Quant à la clientèle, parce qu'il ne faut pas oublier que l'on achète un peu aussi la présence de ses compagnons de voyage, elle a apprécié les soirées dansantes tout en restant discrète et s'est avérée fort bien élevée. On croit rêver! En même temps, à quoi se fier de nos jours sinon à l'expérience.

CroisiEurope organise des Croisières du Nouvel An et Marchés de Noël  sur les grands fleuves. Le Rhin, le Danube, le Rhône, le Pô… A Strasbourg, Amsterdam, Lyon, Venise, Budapest, Bratislava… L'occasion de se pencher sur les coutumes de Noël en Europe en dans les régions françaises.

Santa Klaus, les Rois Mages et la Befana


Voir la vidéo...(3:30)
En Allemagne, le marché de Noël se niche dans les petites rues autour de la cathédrale à Aix la Chapelle et autour de la statue de Roland à Brême. A Quedlinburg, ce sont les 24 cours intérieures de la cité médiévale qui symbolisent chacune un jour de l'Avent, tout comme à Weimar où le Père Noël ouvre chaque jour une fenêtre pour les enfants. A Ratisbonne, autre ville médiévale, c'est le château romantique des Thurn und Taxis qui sert de toile de fond aux quatre marchés de Noël.

Au Danemark, les châteaux sont mis à contribution pour fêter Noël. Au nord de Copenhague au château de Kronborg par exemple où, en plus des ballets et concerts, des laboratoires de décoration et des dégustations de bière de Noël sont organisés dans les salles antiques. Au village d'Odense, où est né Andersen, les personnages de ses contes se mettent en scène au marché de Noël et dans les cuisines des fermes du village de Fionie, on peut revivre Noël comme en 1800. Et il ne s'agit là que d'une poignée d'exemples de toutes les foisonnantes propositions des pays du Nord en général.

L'Espagne, n'est pas moins fervente et, dans la péninsule ibérique, les fêtes de fin d'année ne se terminent pas avec le Nouvel An, la Nochevieja. Les enfants attendent les Rois Mages le premier dimanche de janvier avant de retourner en classe. Ce sont eux qui ont les bras chargés de cadeaux. En attendant, les crèches occupent tout le temps de l'Avent. Parfois signées par de grands artistes et grandeur nature, elles sont aussi nombreuses à recruter des habitants qui réalisent ainsi des tableaux vivants de la Nativité. A Buitrago près de Madrid avec 200 acteurs; à Bàscara (Gerone) depuis 1973 avec 300 figurants qui retracent ainsi la création de la Palestine il y a 2000 ans; à Sangüesa en Navarre où la venue des Rois Mages est mise en scène…

En Italie, les sorcières ne lâchent pas l'affaire, la Befana, la sorcière sur son balai qui apporte du charbon aux enfants (en fait il s'agit de chocolat) arrive dans la nuit du 5 au 6 janvier et sa légende vient de celle des Rois Mages (Befania "Epiphanie"). Elle est suivie d'une Fête des Lumières et arrive dans les maisons de manière diverse et variée. A Cannobio, Stresa, Santa Maria Maggiore sur les bords du lac Majeur, mais là, elle arrive en parapente, un peu à l'image de la Reine d'Angleterre en hélico avec James Bond aux Jeux Olympiques.

A Londres enfin, last but not least, le Christmas Tree trône sur Trafalgar Square en attendant le divin enfant royal et on en profite pour visiter l'exposition "Costumes d'Hollywood"  jusqu'au 27 janvier.

Noël au pays des sapins

Voir la vidéo... (1:58)
Direction l'Alsace et les conifères sans lesquels la ligne bleue des Vosges ne serait pas. A Colmar, comme chaque année, ce sont 5 marchés de Noël qui sont installés dans la vieille ville avec des animations, des concerts, des chorales d'enfants sur des barques illuminées jusqu'au 31 décembre. Toute l'Alsace est à l'unisson. De l'autre côté du Ballon du même nom avec ses champs de neige sauvage chers aux skieurs nordiques et amateurs de randonnée en raquettes, Belfort  et sa citadelle de grès rose gardée par le Lion de Bartholdi joue le jeu des lumières et des animations  le long de la Savoureuse du 1er au 30 décembre. Chaque jour, le bus des Neiges fait la route du centre de la ville jusqu'au sommet du Ballon d'Alsace (1247m) pour transporter les skieurs.

La Franche Comté s'emploie à faire le lien entre le massif des Vosges et celui du Jura avec son désormais reconnu "Incroyable Décembre en Franche-Comté". A Besançon avec les ateliers d'artistes, Montbéliard et les Lumières de Noël, la station des Rousses et la Féerie de Noël au Pays des Sapins et même la possibilité de séjourner à Laponia Dream, directement dans une des villégiatures du Père Noël.

Un peu plus au sud, entre l'Isère et la Savoie, c'est le charme silencieux et majestueux de la Chartreuse. Dans les caves où sont distillées les fameuses liqueurs, 9 représentations de la Nativité seront données les 16, 23 et 30 décembre par les ateliers Casalibus et la compagnie de Monika Regattieri qui jouera La Pastorale des Santons. La réservation est tout simplement impérative.

Noëls royaux au château

Voir la vidéo... (1:33)
Le Pays des Châteaux et de la Renaissance ne s'en laisse pas conter. A Noël, la vallée des Rois de France illumine ses châteaux de la Loire. A Amboise  jusqu'au 6 janvier sur le thème des traditions à travers les siècles, de la Renaissance jusqu'au XIXème siècle. A Chenonceau  avec de fastueux sapins et de grands feux allumés dans les cheminées du château. A Langeais, jusqu'au 29 décembre, on propose aux enfants de porter des costumes d'époque avec des robes aux manches bordées de fourrure pour les filles. Les garçons devraient moins aimer les chausses et pourpoint.

Dans le Loiret, l'animation Noël au Château dure jusqu'au 6 janvier avec la découverte d'une fabrique de bonbons à Meung-sur-Loire (là où le commissaire Maigret a pris sa retraite), un goûter de Noël préparé par les mamies du château le 22 décembre à Brisson-sur-Loire, une grande crèche reconstituée dans les écuries historiques du château de la Bussière, des contes de Noël, des promenades aux flambeaux et la création d'une grande fresque de Noël par Priscille Vincens, artiste peintre renommée.

Et des bulles pour conclure en beauté…

En Champagne, 48 villes et villages participent au Chemin des Crèches, un fameux chemin de croix pour des visiteurs qui auront choisi de s'approcher au plus près des bulles sans lesquelles la fête perd beaucoup de son charme. On retiendra les crèches des Amériques à Châlons-en-Champagne en l'église Saint-Alpin, la crèche champenoise en sarments d'Epernay, l'exposition La Crèche animée de Noël du village gaulois parrainée par Uderzo, créateur d'Astérix dans sa ville natale de Fismes.

Et le village de Noël de Reims jusqu'au 30 décembre, avec la Foire de Noël et des Rois jusqu'au 6 janvier en parallèle avec la mise en lumière de la Cathédrale des sacres jusqu'au 1er janvier. Et cette curiosité, une exposition sur l'Alphabet glagolitique croate - Evocation d'une écriture médiévale européenne: du Moyen-Age à nos jours au Palais du Tau jusqu'au 24 février. Tout cela au pays du champagne pour des fêtes pétillantes à souhait. Santé!

mardi 27 novembre 2012

NOËL A L'ITALIENNE


Du vin, des truffes, des chapons, du parmesan, ils ont tout ce qu'il faut les Italiens de la plaine du Pô pour préparer un réveillon d'exception, même si un tout petit peu différent des nôtres. 

Embarquement immédiat pour la province de Mantoue en Lombardie, à la limite de l'Emilie Romagne, tout près de Vérone et pas bien loin de Venise…

Si les chapons de Gianfranco et Raffaella Candadori n'ont pas les pattes bleues comme les volailles françaises de Bresse, les plus renommées de notre patrimoine gastronomique, elles n'en sont pas moins très bien nourries de façon tout à fait traditionnelle (maïs, son, farine de soja sans OGM...) avec en supplément 2 baies locales qu'elles peuvent picorer à volonté en s'ébattant en toute liberté dans les 7 hectares de la propriété.

En Italie, ce que l'on appelle les "Azienda" sont en fait des entreprises, mais, à l'instar du Caselle à San Giacomo delle Segnate où sont élevés les fameux Cappone dei Gonzaga, ce sont des agritourismes. Des fermes italiennes où l'on peut manger et se loger et qui répondent à une charte très stricte. Ils doivent servir au moins 30% des produits de la ferme et 40% en provenance des fermes environnantes s'il ne produisent pas tout. Il y en a 250, - dont 60% totalement bio - , dans la province de Mantoue à l'extrême sud-est de la Lombardie, 40kms de Vérone et moins de 2 heures de Venise.

Les tortelli di zucco, fleurons de la cuisine mantovane

Voir la vidéo... (4:15)
La belle ferme de Gianfranco et Raffaella ressemble à un château et ils ont de nombreux clients fidèles. Le développement des agritourismes n'a pas provoqué de concurrence trop importante pour les hôtels, ces derniers ne sont pas suffisamment nombreux dans une région qui s'ouvre seulement au tourisme et compte bien sur ses visiteurs pour panser ses plaies.

Car c'est là et tout près qu'a eu lieu le tremblement de terre en mai l'an passé. Le résultat, c'est que de nombreux bâtiments historiques comme l'abbaye du Polirone (qui fait partie des sites clunisiens) à San Benedetto Po sont en réfection. On ne visite plus non plus la chambre des époux au Palais Ducal de Mantoue  où ont vécu 18 générations de Gonzague entre 1328 et 1707. Le bon plan, c'est donc de s'y rendre en hiver pour déguster toutes les spécialités gourmandes de la région et y retourner au printemps quand les musées, églises et monuments aujourd'hui fermés, seront à nouveau ouverts à la visite.

La belle et appétissante Raffaella prépare son chapon en filets "à la Gonzague", noblesse oblige. Mais son autre grande spécialité ce sont les tortelli di zucco, c'est à dire les ravioli au potiron qui sont un must dans la région. Avec son coquet bonnet qui lui sert de toque de cuisinière sur la tête, elle entraîne ses clients dans un de ses cours de cuisine, si renommés qu'elle joue souvent à guichet fermé.

Raffaella Candadori
Il s'agit de préparer la pâte des raviolis avec de la farine dans laquelle on fait un puits pour verser des œufs frais et de pétrir le tout du bout des doigts jusqu'à obtenir une pâte souple que l'on va étaler ensuite finement. Plus facile à dire qu'à faire malgré les injonctions énergiques de la maîtresse de maison. "Cosi…cosi…", "giro…giro…" ("comme ça...comme ça", "tourne, tourne"!).

Il s'agit ensuite de déposer la farce préparée à base de purée de courge, de parmesan, de petits biscuits amaretti écrasés et de moutarde mantovane. Ce qui donne à la préparation un exquis petit goût de pain d'épices qui enchante le palais. L'exercice qui consiste à former le petit coussinet pour l'enfermer dans la pâte est aussi un grand moment. Mais la dextérité, comme pour tout, s'acquiert en s'exerçant.

A la table de Raffaella, qui reconnaît "qu'elle n'a pas besoin de ses cours de cuisine pour faire vivre l'entreprise, mais qu'elle le fait parce qu'elle adore ça! ", on se régale aussi de la sbrisolona, un gâteau qui ressemble un peu à un crumble avec des noisettes et fruits secs, qui ne se coupe pas mais se détaille entre les doigts. Idéal à rapporter comme cadeau pour la famille et les amis, il se conserve extrêmement bien.

On trouve aussi la fameuse moutarde, un peu partout autour de Mantoue et sur la rive gauche du Pô. Elle n'a rien à voir avec le condiment auquel on est habitué, mais elle vaut le détour. Il s'agit de fruits taillés (pommes, poires, melons…) en tranches et confits dans leur jus, que l'on caramélise ensuite et que l'on additionne d'huile essentielle de moutarde. Raffaella la prépare artisanalement à partir d'une recette familiale.

Trois Routes Gourmandes

Voir la vidéo... (1:40)
Dans la province de Mantoue, les vins comme le Lambrusco Mantovano DOC, un "frizzante" rouge aux arômes de fraise et de framboise ont leur route des Vins et Saveurs mantouans qui court sur 300km. D'octobre à février, on ne manque pas non plus de déguster la truffe blanche Tuber Magnum Pico, la même que celle d'Alba, mais la capitale de ce produit luxueux et hors de prix où se tient le marché international, ne veut pas partager son appellation.

Pour en savoir davantage, on commence en visitant le musée de la Truffe à Bonnizzo di Borgofranco et on suit la route de la Truffe en faisant étape dans les restaurants et commerces qui la vendent et la préparent. Comme au Corte Della Marchesa à Carbonara di Po, une belle et vaste demeure tenue par de tout jeunes gens dont la mamma dirige les cuisines aux côtés d'un chef. Au menu, risotto à la truffe, œuf à la truffe et sbrisolona aux pommes.

Evidemment, le parmigiano reggiano règne en maître sur le plateau de fromages. Cette spécialité à base de lait de vache est connue dans le monde entier et, si les coopératives qui recueillent le lait dans les fermes arrivent à produire une quantité respectable tout en suivant les recettes ancestrales, les paysans plus âgés se souviennent qu'autrefois, on se contentait de chauffer le lait dans une casserole, de le séparer de la crème que l'on gardait pour faire le beurre, d'ajouter la présure, de mouler le caillé, de conserver dans un bain salé et de laisser vieillir. Exactement comme aujourd'hui.

On ne saurait bien sûr consommer de risotto sans parmesan râpé. Le riz a aussi son périple dans la province (c'est l'équivalent du département français), la Route du Riz et du Risotto mantouansDans la plaine du Pô et de ses affluents, les rizières sont à l'aise et les innombrables variétés de riz (Arborio, Carnaroli et le fameux Vialone None…) permettent d'obtenir des préparations sensiblement différentes.

Voir la vidéo... (8:58)
A la Galerie d'Art Contemporain Premio Suzarra, à Oltrepo - qui par ailleurs a récupéré de nombreuses œuvres dans les églises secouées par le séisme et en présente une installation en situation avec une mise en scène assez bouleversante, - une salle rassemble des tableaux et photos qui montrent les ouvriers (surtout les ouvrières d'ailleurs) des rizières qui ont inventé le risotto alla pilota , littéralement "à la saucisse" qui est en fait un saucisson.

C'est Claudio Mezza qui en est le spécialiste. A l'agence agricole Corte Valle San Martino de Moglia, il a monté un musée de la Civilisation Paysanne en hommage à son grand-père Giuseppe. Il élève environ 200 cochons pour produire un authentique saucisson ( le "salam" en patois mantovan) qu'il commercialise jusqu'en novembre. Sauf qu'à la mi-octobre, il ne lui en restait déjà plus un seul!

Rendez-vous donc au printemps pour le saucisson, visiter les musées réhabilités, découvrir une vie culturelle très intense et continuer à profiter de cette belle région qui a quantité d'autres ressources passionnantes.

mardi 6 novembre 2012

LE PÉPLUM, C'EST DU GRAND CINÉMA!


En arpentant les allées du musée Gallo-Romain de Fourvière qui surplombe le théâtre antique de Lyon, on se dit que l'idée est brillante de parsemer les collections, de projections de "peplums" entre les installations. L'occasion de découvrir les uns et les autres, ici et à Vienne/Saint Romain-en-Gal au bord du Rhône, et de pénétrer dans l'histoire antique y compris fantasmée et sans complexe.

Tout à côté des projections, sur écran de cinéma et pas sur des écrans plats de télé, installées dans le parcours de l'exposition permanente, veille la Table Claudienne de l'Empereur Claude, né à Lugdunum et emblématique de la ville fondée par les Romains en 43 avant J-C, en même temps que d'autres précieux objets archéologiques.

Pour donner de la vie à cette collection qui pourrait paraître un peu austère, l'exposition Peplum qui dure jusqu'au 7 avril 2013 dans les musées Gallo-Romains de Lyon et Saint-Romain-en Gal, s'articule sur deux thèmes que l'on pourrait résumer ainsi "l'Antiquité spectacle" à Lyon et "L'Antiquité au cinéma" à Vienne.

Ce grand événement qui utilise ces films historiques à grand spectacle dont raffole le public depuis l'invention du cinéma, ne prétend pas légitimer les scénarios de ceux-ci, loin de là. Il s'agit en fait de relier l'illustration de l'antiquité avec le cinéma dont Lyon est le berceau avec les frères Lumière. L'Institut qui porte leur nom est d'ailleurs partenaire de l'exposition par le Conservatoire de Lyon et propose cycles "Péplum" et ateliers sur le sujet.

Une course de chars d'anthologie

Voir le docu... (Sous-titres activés, c'est mieux!)
Les plus âgés d'entre nous se souviendront longtemps des cinémas bondés, même dans les villages, à la sortie du Ben Hur de William Wyler en 1959 avec sa course de char qui durait une demi-heure montre en main. Claude Aziza, historien de l'antiquité Fantasmatique (ce qui est riche de promesses quant à l'intérêt que le sujet devrait susciter…) avec quelques autres respectables sommités, s'amuse à balayer les idées reçues et à raconter une foule d'anecdotes. Ainsi apprend-on que les créateurs de péplums ne manquaient pas d'imagination, car s'il fallait établir une biographie fiable de Spartacus, elle tiendrait sur une dizaine de pages. Et l'historien précise "A peu près comme pour Jésus!"

William Wyler, encore lui, n'a jamais voulu toucher à la course de chars de son Ben Hur de 1959. Il avait réalisé celle de la version de 1925 et il a été pris d'une angoisse au moment de se lancer dans celle-là. Il a confié les rênes de l'exercice à un jeune assistant prometteur, un nommé Sergio Leone qui s'en est fort bien tiré.

Tout est à l'avenant. Les péplums brodent beaucoup sur l'histoire. Bizarrement les séries télévisées sont plus fiables parce qu'elles disposent souvent de davantage de temps pour détailler l'intrigue. Et puis l'on est, de nos jours, plus scrupuleux avec la vérité historique.

Ils sont tous là ou presque
Gladiator de Ridley Scott avec Russel Crowe, L'enlèvement des Sabines de R. Pottier, les deux Ben Hur précédemment cités, Quo Vadis de E.Guazzoni - bien à sa place dans la ville qui accueillit la plus ancienne communauté chrétienne de la Gaule et connue pour le récit du martyre de 177. Ce qui vaut encore aujourd'hui, le titre de Primat des Gaules à son archevêque - Fabiola de A.Blasetti et Massada de M.Bonnard et celui de B.Sagal tournent en boucle dans les 5 parties de l'exposition permanente qui leur ont été dévolues.

A Saint-Romain-en-Gal, on est davantage dans une configuration d'exposition temporaire avec un espace aménagé. On est accueilli par le tableau de Lionel Royer représentant Vercingétorix déposant ses armes aux pieds de César et l'exposition et ses projections s'articule dans 11 cellules autonomes avec des thèmes caractéristiques du genre :

Voir le film en version intégrale... (2:34:35) !
Le héros antique et même l'héroïne avec Cléopâtre de Mankiewicz et la sublime Elizabeth Taylor,  Samson et Dalila de Cecil.B.DeMille. Les catastrophes, naturelles comme dans Les derniers jours de Pompéi de L.Maggi (1908) et E.Rodolfi (1913), mais aussi divines avec les Plaies d'Egypte et Sodome et Gomorrhe. La religion et Les Dix Commandements de Cecil B DeMille et les héros hollywoodiens mythiques avec Yul Brunner en Ramsés, Gina Lollobrigida en reine de Saba, Kirk Douglas en Spartacus, Charlton Heston en Ben Hur…

Sans oublier, bien sûr, les 45 secondes de Néron essayant des poisons sur des esclaves tourné en 1897 par Alexandre Promio, chef opérateur des frères Lumière, et qui est au péplum ce que L'Arroseur arrosé est au cinéma en général. Le début d'un cinéma de fiction.

Des activités culturelles en nombre
Evidemment le sujet est un régal pour que puissent s'organiser de multiples activités culturelles autour de cette exposition qui a reçu, avec 19 autres, le label d'intérêt national du Ministère de la Culture et bénéficie donc d'une subvention de l'Etat.

Après la Nuit du Peplum organisée le 17 juin en avant-première aux Nuits de Fourvière, une autre est prévue le 19 janvier dans le cadre d'un week-end Péplum les 19 et 20 janvier 2013 et des projections en intégralité le dimanche de certains des films présentés.

Des ateliers proposent aux enfants de découvrir l'univers des gladiateurs (le 25 novembre), de créer des accessoires et de participer à un réveillon à la romaine les 30 décembre et 27 janvier. Les idées foisonnent autour du sujet, mais il faut bien reconnaître qu'il s'y prête admirablement.

dimanche 14 octobre 2012

LES SORCIÈRES FONT TOUJOURS RECETTE

Chaque année, les toiles d'araignées reviennent dans les "marronniers". Ces arbres de cour d'école qui désignent aussi les sujets récurrents dans la presse. C'est parce qu'il y avait un grand trou touristique entre les vacances d'été et les fêtes de Noël, que l'on a convoqué les sorcières. Tous à bord du Poudlard Express de Harry Potter...

On peut faire simple et instructif. Pour apprendre aux enfants à préparer une potion magique et découvrir surtout à quoi ressemblait la bouillonnante pharmacopée d'autrefois, rendez-vous dans une apothicairerie, cet ancêtre de la pharmacie. A Bourg-en Bresse, "Dans la peau d'un magicien", est une visite interactive qui enseigne aux enfants les vertus de la poudre de castor, de la chair de vipère, des cornes de cerf et de l'œil d'écrevisse. Elle se déroule tous les mercredis à 15h pendant les vacances scolaires dont la sauce vient tout juste d'être rallongée dans le chaudron magique du grand sorcier Vincent Peillon.

Dans l'Ain également, le 28 octobre à 18h30, une visite mystique et théâtrale sous la forme de saynètes d'antan est organisée dans la cité médiévale de Pérouges. Un décor idéal pour servir de support à l'imagination. Et le 4 novembre, la Compagnie La P'tite Charlotte transporte le public en Ecosse dans le cadre d'un château hanté avec un spectacle de marionnettes et la magie des sons et lumières.

A cheval sur mon balai

Pour une totale immersion parmi les fantômes, sorciers et autres êtres étranges, "the place to be", c'est l'Irlande, bien plus authentique que le cirque de la nuit d'Halloween à New-York et aux US en général. Cette fête païenne de l'entrée dans l'hiver, s'appelait alors Samhain chez les Celtes vivant en Irlande et célébrait la fin des moissons. L'occasion de découvrir les grands feux allumés un peu partout dans les villes et villages à la manière de ceux de la Saint Jean et de déguster le Barm Brack, un cake irlandais à base de thé noir et de raisins secs dans lequel, on glisse un anneau et un penny. Celui ou celle qui trouve le premier se marie dans l'année. Avec le second, c'est la fortune assurée!

Voir la vidéo...
La plus grande fête d'Halloween au monde, c'est le Carnaval de Derry du 26 au 31 octobre. Cette magnifique ville médiévale d'Irlande du Nord sera, en plus, "Ville de la Culture" en 2013. Direction Dublin, pour marcher sur les traces de Bram Stoker, l'auteur de Dracula, qui y est né. Et pour ressentir à fond les impressions les plus troublantes, il faut monter à bord du Tour-Ghost Bus qui sillonne (de nuit), les quartiers les plus mystérieux de la ville.

Pour faire bonne mesure et le plein de frissons, on passera le 29 octobre au château de Bunratty dans la crypte Creepy en compagnie de Dracula, Frankenstein et quelques autres aimables créatures qui s'y sont donné rendez-vous. Reste à se rendre dans le château hanté et les jardins de Bir Demesne le 31 octobre pour y passer une nuit terrible à souhait après avoir, du 26 au 30 octobre, appris à chevaucher un balai de sorcière à Causey Farm, Navan. Marrant comme tout, aux dires de ceux qui ont vu le spectacle. On embarque à Cherbourg, Ouistreham, Roscoff, Saint Malo à bord des navires de Brittany Ferries pour rejoindre le théâtre des opérations.

Mais si l'on souhaite rester dans l'hexagone, on se souviendra que le Berry est une terre de sorciers reconnue et que l'on peut y fréquenter l'école des sorciers (en tenue), les 3 et 4 novembre au musée solognot de la Sorcellerie de Blancafort (18-Cher) avant que les créatures maléfiques ne s'endorment pour l'hiver pendant sa période de fermeture.

Thriller

Disneyland qui affectionnait Michaël Jackson et ses morts-vivants, entretient le culte de la magie qui fait peur jusqu'au 4 novembre avec le festival Halloween  à Disneyland Paris avec, en apothéose, les soirées Terrorific Night au Parc Walt Disney Studios et la présence de Maxime Chattam, expert en thriller. Le "Stephen King" français, qui a écrit une quinzaine de romans et vendu près de 4 millions d'exemplaires, a participé à un court-métrage inédit qui sera projeté les 26 et 27 octobre dans CinéMagique. Il est question de "peur interactive". L'essentiel, n'est-ce pas, étant de participer!

Voir la vidéo...
Il s'agit en l'occurrence, pour le pays de Mickey, de faire très fort pour concurrencer le "Take away" des Horror Nights starring Marc Terenzi présenté à Europa-Park et sacrée meilleure attraction parmi les maisons de l'horreur par le magazine "Los Angeles Times" qui s'y connaît. Il faut dire que l'on y voit des chats en cage et un cuisinier qui agite sa hachette en face d'eux dans un snack asiatique. L'horreur dans tous les sens du terme.

Pour en rajouter dans le cauchemar qui constitue au quotidien la tasse de thé du Manoir de Paris, on a fait appel à Katie et Kristie de "Paranormal Activity" du 19 octobre au 11 novembre. Que deviendra le fils de cette dernière, premier enfant mâle de la lignée, dont l'âme a été vendue au diable par la grand-mère des deux héroïnes?

Ceux qui préféreront la terreur au grand air, choisiront de passer Halloween chez les Dinosaures dans le Jura et de faire un bond en arrière de 65 millions d'années. Ensuite, et sans avoir besoin de se faire téléporter, il suffira  de rejoindre le sentier karstique de Merey-sous-Montrond dans la vallée de la Loue le 31 octobre pour une balade contée sur le thème des citrouilles et des créatures souterraines (on est au pays de la Vouivre…).

Le bois des fées

Voir la vidéo...
Et pour tous ceux qui préfèrent une magie plus lumineuse et les fées plutôt que les sorcières, direction la forêt de Brocéliande en Bretagne qui captive chaque année des dizaines de milliers de visiteurs fascinés par Merlin l'Enchanteur, les fées Morgane et Viviane et l'histoire des Chevaliers de la Table Ronde, du roi Arthur et de Lancelot du Lac. La grande nouveauté cette année, c'est l'ouverture depuis le 17 septembre de La Porte des Secrets dans le cadre des bâtiments historiques de l'Abbaye de Paimpont. Il s'agit d'un parcours scénographique d'une quarantaine de minutes qui évolue à travers 4 salles et 300m2 de décor. A la découverte de l'atelier de Pierre, le garde forestier et narrateur, la forêt, la forge et l'arbre maître.

La bonne nouvelle, c'est qu'il s'agit de lieux enchanteurs à découvrir toute l'année. De quoi prendre son temps pour partir à la rencontre des légendes de Brocéliande et, qui sait, du fantôme de la Dame Blanche du château de Trécesson.

lundi 24 septembre 2012

LES CASOTS FAUVES DU VIGNOBLE CATALAN


Chaque année depuis quelques unes, la maison Cazes, dans le cadre de l'association Notre Dame des Anges, invite des "fous de couleur" à restaurer les casots, ces petites cabanes plantées au milieu des vignes. Une idée lumineuse!

Le 8 septembre dernier, un très sérieux jury (dont nous étions…) a sacré "Enologos" champion du plus joli casot restauré dans les vignes de Collioure, Port Vendres, Banyuls et Cerbère. Cette joyeuse bande avait récupéré le matériel le matin même en vue de redonner une apparence un peu plus avenante à ces petites maisons de vignerons que l'on appelle "cadoles" dans les autres vignobles et qui sont souvent laissées à l'abandon. Le résultat, c'est qu'ils se retrouvent couverts de tags et en état de décrépitude avancée.

Ce sont ceux-là que l'association Notre Dame des Anges (du nom de l'église de Collioure) souhaite restaurer. Les autres, qui ont été achetés par des habitants du coin pour servir de "grillodrome" les dimanches en famille, étant à peu près bien entretenus.

Des pastels soutenus

Le pays catalan qui ne manque jamais une occasion de se cramponner à ses racines, propose aux artistes d'un jour de réhabiliter les casots (on prononce le "t" dans le Midi, écoutez ici!) aux couleurs des peintres fauvistes comme Matisse et Derain qui ont laissé des traces à Collioure et ont acquis une renommée mondiale. Au point que, le musée d'Art Moderne de Collioure expose essentiellement des reproductions sous verre, car les originaux se trouvent dans les grands musées du monde.

Voir la vidéo...
C'est pourquoi la petite ville catalane (où nous retournerons au printemps pour suivre notamment le Chemin des Fauvistes qui dévoile 20 reproductions, installées là où les deux grands maîtres fauves ont peint les originaux en 1905…) loue des pas de portes bon marché aux artistes qui le souhaitent et les encouragent à "faire du Collioure". Nos peintres de casots sont donc bien dans la ligne.

C'est aussi l'occasion de découvrir cette ville chère à Charles Trénet à qui elle a inspiré La Jolie Sardane (écoutez ici!) qu'il est conseillé de fredonner dans sa tête pour se mettre dans l'ambiance en allant de vignes en caves.

Halte au Clos de Paulilles à Port Vendres. On y est au cœur du vignoble concerné qui espère bien un classement prochain au Patrimoine de l'Unesco et tout proche d'une petite crique dissimulée le long de laquelle pour paraphraser Trenet, toujours lui, la mer vient danser.

La vigne bien dans sa terre

La Maison Cazes, fondée en 1895 et son directeur Lionel Lavail ont pris les choses en main et il semble que tout le monde suit très bien. Au domaine, on pratique la biodynamie. C'est à dire "un nouveau mode de culture qui travaille sur le bien être de la plante, sur son épanouissement, permettant ainsi la véritable expression du cépage dans son sol". Et Emmanuel Cazes, le petit fils du fondateur d'expliquer "ce n'est pas bien difficile de faire bien".

Il fait presque toujours beau dans cette région aux portes de l'Espagne (catalane s'entend), mais il faut savoir que c'est au prix de vents forts dont la vigne profite aussi. La Tramontane qui dévale des sommets des Pyrénées et le Marin qui vient du large et enveloppe le sommet du Canigou de brume en matinée.

Voir la vidéo...
La Maison Cazes qui a la fibre bio, mais sans verser dans l'intégrisme, a ouvert un restaurant dans le domaine près de la boutique de vente de vins. Confié au chef Sébastien Colombier, il s'appelle "La Table d'Aimé", prénom du fils du fondateur de la dynastie Cazes et en même temps celui du grand père du cuisinier.

En été, c'est l'adresse du déjeuner du dimanche des gens de la région et la liste des producteurs inscrite sur l'ardoise à l'entrée rassure sur la qualité des produits. Les poissons frais viennent de la Côte Catalane à Port Vendres, le pain à l'ancienne, cuit au feu de bois, du Pétrin d'Ancel à Rivesaltes et la côte de bœuf directement de chez un éleveur des Pyrénées.

On déguste toutes ces bonnes choses avec les vins de la maison. Comme le Canon du Maréchal (Joffre, né à Rivesaltes le 12 janvier 1852) en rouge, rosé et blanc, d'un excellent rapport qualité prix et les fameux Vins Doux Naturels (VDN pour les spécialistes) dont les noms chantent à l'oreille, même de ceux qui n'y connaissent rien ou presque.

Le Rivesaltes ambré et le Muscat de Rivesaltes. Lionel Lavail, lui-même petit fils de vigneron, raconte que sa grand-mère a toujours congelé des raisins muscat au moment des vendanges et qu'elle s'en sert comme glaçons dans le Muscat de Noël. Un fois dégelés, ne reste plus qu'à croquer les grains de raisin en dégustant le vin. En voilà une idée géniale!

mercredi 5 septembre 2012

DE CARTHAGE A ZAGHOUAN

Autant se faire à l'idée que rien ne peut plus jamais être comme avant. La saison d'été en Tunisie a accueilli pas mal de touristes, mais pas autant de Français qu'espéré. De l'autre côté de la Méditerranée, ça continue à tanguer. Mais il y a beaucoup à découvrir si on ne veut pas se contenter de se retrouver enfermé dans les "Resort" de Djerba bien trop à l'abri des réalités.

Il s'agit de rencontrer une population qui se surveille du coin de l'œil et qui s'affronte. Jeunesse moderne, rompue à l'exercice du tweet, friande d'art contemporain et de manifestations culturelles qui n'a pas peur de bousculer les traditions. Avec en face les salafistes qui veulent énergiquement rhabiller les touristes et les autres sous prétexte que l'on est là "en terre d'islam". Ce qui a de quoi épouvanter les voyageuses en robe légère qui savent parfaitement enfiler un pull pour entrer dans une mosquée, mais certainement pas pour se balader sur une jetée au soleil couchant dans la douceur du soir.

Les jeunes Tunisiennes éprises de liberté le ressentent tout autant et s'inquiètent. Elles ont raison de craindre de devenir un "complément" des hommes comme il en serait question dans la future constitution . Mais c'est oublier que même en France, il y a des illuminés qui s'en prennent aux restaurants ouverts au déjeuner pendant le Ramadan et qui obligent des filles en banlieue à porter des joggings informes à défaut de voile. Il ne s'agirait que d'épiphénomènes? Certes, certes. Mais ne soyons pas trop naïfs quand même!

Les leçons de Carthage
Voir la vidéo...
Pour tenter de se reconstruire dans l'harmonie, la Tunisie peut parfaitement jeter un œil sur son passé pour se rendre compte de ce qu'a pu être sa grandeur et quelles sont ses ressources: De l'eau, du soleil, un climat très clément. De quoi cultiver, construire, accueillir, donner à visiter, retrouver la prospérité.

Du temps de la fondation de Carthage par la grande Didon en 814 avant Jésus-Christ, elle fut le grenier à blé de Rome, la deuxième ville d'Occident et la plus grande puissance maritime surveillant un empire qui s'étendait sur tout le bassin occidental de la Méditerranée. Du temps d'Hannibal (IIème siècle avant J.C.) - qui fait l'admiration des guides érudits du site - , il reste, sur les flancs de la colline de Byrsa, les vestiges de tout un quartier d'habitation. Les statues et autres objets trouvés dans les nécropoles constituent l'exceptionnelle richesse des musées et notamment du musée national de Carthage

Loin des grandes unités hôtelières de plusieurs centaines de chambre, on découvre la Villa Didon dont les larges baies ouvrent grand sur la mer. Dans ce 5 étoiles qui fait partie de ce que l'on appelle les "boutiques hôtels" , on profite d'une décoration moderne et raffinée sans aucune concession à quelque folklore que ce soit. On imagine alors le tourisme tunisien en devenir.

Un aqueduc de 132 kilomètres de long
Voir la vidéo...
Tout le long de la route qui va de Tunis au parc du Temple des Eaux de Zaghouan , on peut voir les vestiges de cet ouvrage d'art impressionnant construit par les Romains au 1er siècle avant J.C. C'est un des buts de promenade des Tunisois qui poussent aussi parfois jusqu'au Capitole d'Uthina (Oudhna) dédié à Jupiter, Junon et Minerve construit sur les hauteurs ce qui permet de découvrir toute la plaine presque jusqu'à la mer.

C'est le plus grand capitole d'Afrique. Là aussi d'énormes citernes, les vestiges de demeures patriciennes, des thermes et un amphithéâtre d'une capacité de 10000 personnes dans lequel on nous a raconté que l'on avait un beau jour amené le lion du zoo de Tunis pour faire de la figuration (avec comme ressource de le dupliquer numériquement sous différents angles pour répondre aux exigences de la mise en scène). Repu et dérangé à l'heure de la sieste, l'animal avait du mal à ouvrir l'œil.

Les écoliers viennent en bus avec leurs professeurs pour apprendre l'histoire et c'est une occasion de croiser les gens d'ici. Ceux-là même que le couple Zeribi emploie dans sa maison d'hôtes de Dar Zaghouan où se retrouvent les Tunisois aisés (ou même moins) après une heure de route pour le déjeuner du dimanche. Les propriétaires de cette maison d'hôtes soigneusement écolo ont procédé comme bien des gens chez nous qui décident un beau jour de plaquer des emplois de bureau (même à haut niveau) pour se rapprocher d'une vie qu'ils veulent plus accomplie.

Voir la vidéo...
Les femmes du village voisin fabriquent du fromage comme elles l'ont toujours fait. Une belle berbère costumée prépare le pain en collant la pâte sur les parois intérieures du four dans lesquelles somnolent les braises et on déguste à table les pigeons de la propriété, la viande des autruches de l'élevage, et les légumes du jardin servent à confectionner le couscous. L'huile d'olive est pressée ici et il est des clients qui marcheraient jusque là sur les mains pour un verre de la limonade artisanale maison.

Quelques chambres et suites autour de la piscine et on passe là un séjour dans un lieu qui vaut tous les hôtels de luxe des chaînes internationales. On est aussi au plus près de l'évolution du pays, de ses habitants et de leurs perspectives de développement qui sont grandes.
On apprend à les connaître en bavardant avec eux. On s'étonne et ils s'étonnent en se racontant. Ainsi Lazare, notre chauffeur habitué aux oueds qui vit pas si loin du désert, en apprenant qu'à Lyon se rejoignent le Rhône et la Saône, nous demande : "Et ils coulent toute l'année?"

samedi 18 août 2012

LA CANICULE AU FRAIS!

Elle fait ce qu'elle veut la canicule et si les masses d'air qui viennent du Sahara décident de se poser sur la France au cours de la seconde quinzaine d'août, on n'a rien à dire. Seulement voilà, en montagne, là où il fait frais, les établissements commencent à fermer. Mais à Courchevel, le Chabichou continue à ouvrir l'œil.

Il y en a pour dire qu'une canicule après le 15 août, ce n'est jamais arrivé. Preuve que le temps se dérègle. Sauf que, je me souviens parfaitement en 1987, alors que le mois de juillet avait été à peu près aussi frisquet et arrosé qu'en 2012, la grosse chaleur s'était installée en fin de saison et jusqu'au début septembre.

En Egypte, alors qu'on donnait "Aïda" aux Pyramides,  le 19 septembre, il faisait moins chaud qu'à Paris (moins humide surtout, donc l'impression de chaleur accablante n'était pas la même…). Au retour, le 22 septembre, c'était autre chose. L'automne avait débarqué et bien débarqué.

Au Chabichou, et malgré l'adversité (les commerces dans la station n'ont pas ouvert avant la première semaine de juillet, début des vacances scolaires, c'est malin!), on tient la position. Toute la famille Rochedy dont, - en dehors des affinités personnelles qui sont grandes, on ne peut que saluer la disponibilité - , ont décidé d'ouvrir leur hôtel jusqu'en septembre et à des tarifs stupéfiants par rapport à l'hiver. Il faut dire que la clientèle qui raffole de la montagne l'été n'a pas les mêmes moyens, ni les mêmes modes de vie.

Les marmottes, les tarines et les edelweiss

La balade dans le parc de la Vanoise avec Nicolas, le fils de la maison, formé pour être guide de haute montagne, mais qui a bifurqué, par nécessité pour diriger la maison, est un moment exceptionnel. Il raconte ses Alpes comme il les aime avec un je-ne-sais-quoi d'un rien bourru qui apporte la preuve qu'il n'a pas été contaminé une seconde par le bling-bling de la station l'hiver.

Morceaux choisis: "Il faut veiller à ne pas trop rester en bas dans la civilisation, sinon, on perd son âme." Le bas? Non, non, pas la vallée. Pas Albertville, Chambéry, Lyon ou Paris. En bas, c'est la station. En haut, ce sont ses amis qui passent l'été à l'estive avec les troupeaux de vaches tarines, abondancières qui produisent les meilleurs fromages de montagne.

Voir la vidéo...
Nicolas raconte la face de la montagne où l'on retrouve encore des épaves d'avions de tourisme échoués dans les années 50; montre les marmottes dont les terriers abondent et dans lesquels il ne faut surtout pas mettre les doigts pour essayer de les attirer ("vous avez vu leurs incisives!"). Il parle aussi de ce gars de la montagne qui était venu participer à une course d'endurance dans la vallée. Habitué à courir derrière les chèvres chamoisées du troupeau au mépris des dénivelés, il avait demandé quand la compétition commençait alors qu'elle était terminée. Il avait pris ça pour une mise en jambes.

Clin d'œil enfin. Quand arrive septembre et que les champignons pointent le bout de leur nez, on voit débarquer les combis Volkswagen avec des ex-soixante huitards par du tout repentis qui viennent cueillir les champignons qui font voir la vie en rose et en faire provision pour l'hiver.

En bas, c'est à dire à 1850, c'est la vie de presque palace. On profite à fond des tarifs "été" du Spa avec piscine, nage à contre-courant, douches tropicales et polaires et tout ce qui est bon pour ce qu'on a; des délices de la brasserie le Chabotté qui justifie à elle toute seule l'ouverture à l'année et de la table du Chabichou avec les recettes de Michel Rochedy et de Stéphane Buron, le chef Meilleur Ouvrier de France qui partage volontiers sa science et donne des cours de cuisine. Dans certains forfaits à tarifs angéliques, les dîners au restaurant gastronomique sont même compris.

mardi 31 juillet 2012

LES PÉPITES DU PÉRIGORD NOIR


Dordogne river by Jos Dielis / Flickr - Licence Creative Common (by)
Le pays de l'homme, accessoirement celui de la truffe et du foie gras (et inversement…) est aussi une terre de trésors. Quand se termine en mars, la saison du diamant noir, vient celui, des châteaux, des jardins et de toute une profusion de sites pour la plupart inscrits au Patrimoine Mondial de l'Humanité par l'Unesco.

Des hauteurs de la forteresse de Beynac, Guy Coy détaille tous les châteaux qui émaillent les bords de la Dordogne. Chacun gardait jalousement son territoire et surveillait les autres. Il faut dire que le Périgord est une terre d'histoire et de conquêtes. Les hobereaux des lieux, comme le sont les barons de ce château féodal du XIIIème siècle qui écrase de sa masse le village construit tout autour et admirablement préservé, se méfiaient des autres baronnies du Périgord et des envahisseurs venus des 4 coins du royaume et au-delà. Conservé par des propriétaires privés, il se visite pendant toute la saison.

C'est là que Besson a tourné des scènes de sa Jeanne d'Arc et, quand on se trouve dans la grande salle où les épées sont encore fichées dans les encoches qui leur était réservées dans la table à manger, on peut voir la rampe d'accès qu'a empruntée à cheval Sophie Marceau en jouant "La Fille de d'Artagnan".

Des ambassadeurs infatigables

Notre guide n'en est pas un, pourtant, il connaît la région comme sa poche et en fait profiter tous les hôtes qui résident dans son Village de Gîtes "Combas" qu'il a construit lui-même, deux pas du village de Saint-Crépin-Carlucet.

Voir la vidéo...
Agriculteur d'origine et fils de paysans depuis des générations, il a été conduit à transformer totalement son activité pour se tourner vers le tourisme, devenu désormais la toute première ressource de la région. Il a ensuite remonté les manches et construits des gîtes dans le style du pays pour des clients fidèles qui s'y pressent toute l'année.

Séjourner chez Guy et ses semblables regroupés dans l'association des Villages de Gîtes, c'est passer ses vacances en profitant des lumières et de la disponibilité infinie des propriétaires. Tous adhèrent à une charte qui leur impose un certain nombre d'exigences comme celle de comprendre le nombre d'hébergements entre 5 et 30, de disposer d'un accueil (on ne récupère pas les clés à la mairie ou chez la voisine...) et surtout d'une piscine ou d'un plan d'eau. Partant de là, les propriétaires, tous indépendants, s'investissent auprès de leurs clients, mais chacun à sa sauce.

Les uns (presque tous d'ailleurs) les accompagnent en randonnée, leur font descendre la Vézère ou la Dordogne en canoë, organisent une soirée d'accueil pour leur permettre de faire connaissance, préparent des repas ou prévoient des livraisons par un traiteur. C'est ainsi qu'à la Peyrière, on se retrouve dans une vraie ferme dont on a transformé toute une prairie en Swin Golf avec toute la famille Bartou autour de son patriarche.

Aux Collines d'Eyvigues, la propriétaire, autrefois enseignante cultive un jardin de plantes aromatiques dans lequel les clients vont se servir pour agrémenter leurs plats et son époux, ancien coiffeur organise lui aussi les réjouissances. Dominique au Hameau du Sentier des Sources exprime son goût pour la déco dans les exquises maisons de vieilles pierres qui composent son domaine et Jean-Paul Brégégère à la Brousse Basse, ancien restaurateur et trufficulteur est choisi par les gourmands qui veulent profiter de la gastronomie locale.

Du confit et des hommes

Voir la vidéo...
Guy, qui s'épanouit dans son rôle de guide intarissable, pose la question "Quand on vous dit Périgord, vous pensez à quoi?" Les réponses fusent "la bonne cuisine, la truffe, le foie gras!" Certes, certes, mais et la Préhistoire alors? Lascaux II qui ne suffira bientôt plus à absorber tous les touristes et pour laquelle le projet Lascaux III est en route; la falaise, en surplomb de la Vézère, de la Roque Saint-Christophe qui fait un kilomètre de long et dont les cavités ont été occupées pendant la Préhistoire et l'époque médiévale; les Grands Sites du Périgord sous la bannière desquels se sont regroupés 14 d'entre eux et qui connaissent depuis le début de l'année une augmentation de fréquentation de 30%.

Une saison d'été n'y suffit jamais. C'est aussi la raison pour laquelle il ne faut pas hésiter à visiter le Périgord hors saison. L'automne et le printemps restant fort agréables au niveau du climat. Nos amis britanniques qui fuient cette année l'afflux des Jeux Olympiques se retrouvent avec conviction dans celui des sites touristiques.
Pour découvrir la Roque Gageac, un village construit dans la roche à flanc de montagne et descendre la rivière en gabares, nul besoin d'être au mois d'août. Ni non plus pour explorer Castelnaud, le château le plus visité du midi de la France avec son musée de la Guerre au Moyen-Age et ses animations médiévales.

Pas davantage pour admirer la Maison Forte de Reignac, l'unique château-falaise intact de France et ses nombreuses salles entièrement meublées. Avec une mention spéciale pour son musée de la torture du Moyen-Age à la Révolution (âmes sensibles s'abstenir…) Cette exposition itinérante a d'ailleurs été présentée cet hiver au Manoir de Gisson qui donne à voir la vie bourgeoise sarladaise au XVIIème siècle dans la cité médiévale.

Sarlat, capitale de la truffe et du foie gras

Voir la vidéo...
Sarlat vaut le détour à elle toute seule. Parce qu'elle a traversé les siècles dans l'opulence, qu'elle a été la première, alors qu'elle menaçait ruine, à bénéficier de la loi Malraux (4 août 1962) permettant la restauration des centres historiques. Elle a été sauvée juste avant le Vieux Lyon et la ville d'Uzès. En plus de ses somptueuses maisons anciennes (dont la maison natale de la Boétie) et ses tours de noblesse, elle continue à évoluer, notamment sous l'influence de l'architecte sarladais de renommée mondiale Jean Nouvel.

Il a fait construire un ascenseur panoramique dans l'église Sainte Marie permettant de découvrir à 360° les toits de la ville et ses monuments: l'église Saint Sacerdos, la lanterne des morts, le Palais des Evêques, l'hôtel Plamon...  Sarlat vit à plein régime (!) en toute saison. Il ne faut pas manquer son marché aux truffes tout l'hiver et la Fête de la Truffe et Académie culinaire du Foie Gras et de la Truffe à la mi-janvier.

C'est donc une région dont la richesse historique, patrimoniale et gastronomique donne le vertige que Guy et ses semblables font découvrir à des clients fidèles année après année. Avec les autoroutes comme l'A20 et l'A89 au départ de toutes les grandes villes Paris, Lyon, Bordeaux, Toulouse et même Madrid (pas plus loin que Paris), on y vient assez facilement même pour de courts séjours plusieurs fois dans l'année. Et on visite, on découvre, on profite avec délectation. Il est même, en plus des Anglais qui sont légion, des Américains qui s'y sont installés pour de bon.

A lire: Le Petit Futé en Dordogne.

jeudi 12 juillet 2012

UNE AUTRE PAIRE DE MANCHES…

Vue sur la campagne langroise depuis le toit de la Cathédrale Saint Mammès de Langres.
L'expression vient du Moyen Age et, comme beaucoup d'autres, on l'utilise encore énormément de nos jours tout en sachant rarement d'où elles viennent. C'est Catherine Boussard qui les raconte en commentant les trésors de sa ville médiévale de Châteauvillain exactement située à l'époque aux frontières du royaume de France et des duchés de Lorraine et de Bourgogne. Forcément, il y avait pas mal d'agitation. Ce qui a laissé des traces…

Pendant que les comédiens préparent à Langres leur spectacle pour un Estival des Hallebardiers qui commence les 27 et 28 juillet et dure jusqu'au 25 août à travers les rues de la cité fortifiée, on part à la rencontre de l'Histoire à la frontière de ce qui était autrefois le royaume de France, le duché de Bourgogne et celui de Lorraine. A la découverte de la ville de Langres et ses impressionnantes fortifications, des jardins du château de Joinville et de l'étonnante cité de Châteauvillain…

J'ai commencé à évoquer la riche histoire de la Haute Marne et ses très nombreux et illustres personnages à la fin du printemps. De Gaulle, Voltaire, Diderot et beaucoup d'autres ne faisaient qu'investir un territoire qu'avaient occupé avec détermination les ducs de Guise et les sires de Joinville, les ducs de Vitry et de Penthièvre.

On trouve trace de leur présence dès le 12ème siècle, mais encore bien plus tôt à Andelot, puisque le traité  signé en 587 entre Brunehilde et les rois francs est peut-être le plus ancien document politique conservé de l'Histoire de France.

Le fief des ducs de Guise

Le château de Joinville et son Grand Jardin a été construit par Claude de Lorraine, le duc de Guise, entre 1533 et 1546. Il ne s'agissait, en fait, que d'une construction de plaisance dominée par l'ancien château érigé sur un éperon au XIème siècle et propriété de la famille. Il n'en reste rien du tout. Il a été détruit en 1791. Epoque difficile pour les demeures seigneuriales…

Soigneusement restauré, le "château d'Enbas" accueille des expositions et vaut surtout pour son parc romantique dont Hubert Puzenat, grand spécialiste et expert reconnu de l'art topiaire entretient les chefs d'œuvre au lieu de couler une retraite insupportablement inactive. Les essences rares sont nombreuses. Le gingko biloba (une espèce vieille de 160 millions d'années) côtoie le séquoia géant de Californie, le cyprès chauve qui vient de Louisiane et le liquidambar et sa sève d'ambre liquide, précieuse pharmacopée.

Entre les sculptures contemporaines qui s'intègrent parfaitement bien à la végétation, un cygne noir monte la garde dans les étangs et se fâche volontiers contre les promeneurs. Lesquels ont le droit, au moment des récoltes, de se servir dans le jardin potager.

La petite ville de Châteauvillain a aussi sa célébrité contemporaine, (Simone de Beauvoir y passait ses vacances chez sa grand mère), mais elle est au moins aussi impressionnante que Langres et ses remparts qui espère son classement au patrimoine de l'Unesco. Non pas au titre du Patrimoine Vauban, mais à celui de plus grande enceinte fortifiée d'Europe (3,5 km de remparts).

Car la tour de Navarre, malgré ses 28m de diamètre et ses murs de 13 mètres d'épaisseur, non plus que les tours d'artillerie, les chemins de ronde et les 7 portes de la ville ornées de niches religieuses, ses maisons anciennes et ses fontaines ne sont pas l'œuvre de Vauban. Le génie militaire s'était contenté de venir les apprécier en 1698.

Pour découvrir Châteauvillain, il faut absolument rencontrer les membres passionnés de l'association "La Clef des Champs"  qui déploient une énergie stupéfiante pour entretenir et faire découvrir la ville.

A la suite de Catherine Boussard, on apprend qu'au Moyen Age, la citadelle et son château était protégés par une enceinte de 2,6km et comptait 60 tours. Des trois portes de la ville, il ne reste qu'une seule, la porte Madame qui constitue l'entrée du Parc aux Daims, un espace de 272 ha qui devrait accueillir en 2013 la station forestière touristique Animal' Explora.

C'est en considérant la maquette présentée dans la tour de l'Auditoire que l'on mesure l'espace occupé par le château dont il ne reste plus grand chose aujourd'hui. N'allez pas imaginer qu'il a été détruit par la Révolution. L'ignorance est aussi très forte pour faire des dégâts. Il a été vendu comme carrière de pierres et traversé de part en part par la nouvelle rue principale que l'on voulait plus large. En 1804, l'église St Berchaire, le château des Broyes, la salle d'arme, celle du pilier et la porte de 2,60 m y sont passés!
Si toutes ces merveilles avaient tenu jusqu'à l'époque de Malraux, elles auraient peut-être été sauvées comme la vieille ville de Sarlat, Uzès et le Vieux Lyon.

Expressions médiévales

N'empêche, il reste beaucoup à voir et à entendre à Châteauvillain. Dans la Tour de l'Auditoire, on jugeait les prévenus et même les animaux comme les porcs et les mulots (!) qui risquaient jusqu'à l'excommunication.

Catherine Boussard captive son auditoire avec les expressions du Moyen Age qui sont arrivées jusqu'à nous.
On consignait les jugements sur un parchemin que l'on entourait autour d'un rouleau appelé "rôle". Et on jugeait ainsi les affaires à "tour de rôle". Elles étaient ensuite rangées dans un sac, ce qui fait que l'on pouvait dire que "l'affaire était dans le sac".

Pendant les tournois, les dames, qui portaient des robes lourdes et difficiles à nettoyer avec des manches amovibles, les détachaient pour les lancer à leur chevalier. Première manche, seconde manche et si les combattants n'étaient pas départagés, c'était, vous l'avez compris "une autre paire de manches".

On découvre aussi le jardin médiéval dont les productions servent à organiser des festins médiévaux; le lavoir à parquet flottant qui permettait de régler la hauteur pour travailler. Il est unique en France. Et aussi l'impressionnant colombier où vivaient jusqu'à 12.000 pigeons, lui aussi un des plus grands de France (Diderot le cite dans son Encyclopédie). Ils étaient élevés pour leur fiente qui servait d'engrais aux cultures et sa taille témoigne parfaitement de l'opulence de la ville.

Les seigneurs de Châteauvillain sont illustres dans l'histoire. Après Jean 1er arrière-petit-fils de Louis VII et pour ne citer qu'eux, il y a eu Nicolas de l'Hôpital, duc de Vitry capitaine des Gardes de Louis XIII et le Duc de Penthièvre, petit-fils de Louis XIV et de Madame de Montespan, grand seigneur - parce que son père avait été légitimé - , à la fois très riche et très généreux, il était surnommé le Prince des Pauvres. Avec ses grandes familles et toute l'histoire de France qui bruisse dans ses bourgs et ses villages, la Haute Marne a beaucoup à raconter.

Pour y séjourner, les chambres d'hôtes, gîtes et toutes sortes d'hébergements se sont multipliés. On peut aussi largement profiter de la nature, des forêts à pied et à vélo et des spécialités locales comme le fromage de Langres et les écrevisses de Thonnance-lès-Joinville dont c'est la pleine saison.

A l'automne, viendra le temps de la chasse (le Salon des Plaisirs de la Chasse et de la Nature se tient justement à Châteauvillain les 25 et 26 août…) dans une forêt domaniale de 10.000 ha qui sera bientôt, avec celle de la Côte d'Or, Parc Naturel National. Mais aussi celui des truffes, des vins, des alcools de fruits et de tout ce que produit cette terre grasse et généreuse. Mais là encore, c'est une autre paire de manches!

vendredi 22 juin 2012

CHEFS D'ŒUVRE EN SOUS-SOL


Il n'est pas rare que certaines œuvres attribuées à des artistes majeurs aient été déclassées et aient ainsi rejoint les réserves des musées pour y entrer dans un long hiver. Mais il arrive aussi que certaines d'entre elles soient réhabilitées. C'est le cas du "Gerfant" de Géricault qui est remonté triomphalement de la cave du Musée d'Art Roger-Quilliot à Clermont-Ferrand.

Du coup, la découverte s'est muée en exposition événement "Géricault, au cœur de la création romantique. Etudes pour Le Radeau de la Méduse" est présentée dans la chapelle des Ursulines au musée d'art Roger-Quilliot à Clermont Ferrand jusqu'au 2 septembre 2012.

Il ne s'agit pas de l'exposition la plus joyeuse de la saison culturelle et pourtant, elle est née de l'enthousiasme de 3 personnes, sans doute animées par le souci de rendre justice à Théodore Géricault, soi-disant peintre maudit, et aussi de créer un événement d'ampleur nationale dans la capitale de l'Auvergne.

Alors que les spécialistes du premier des romantiques - on s'écharpe beaucoup entre historiens de l'art pour le situer entre classicisme et romantisme, sinon qu'il est à la charnière des deux mouvements… - étaient relativement nombreux il y a quelques dizaines d'années, Bruno Chenique qui est aussi le commissaire de l'exposition avec Anne-Charlotte Cathelineau, conservatrice des collections, est à peu près le seul aujourd'hui.

C'est lui qui a demandé à voir, il y a 4 ans le portrait de "Gerfant" légué au musée par le duc de Morny et relégué dans les réserves depuis 1976 par un expert qui l'avait "déshérité".


Gerfant ou Gerfaut, un des modèles du radeau

Rendu à ses origines, l'idée s'est tout de suite imposée de l'exposer en point de départ au cheminement de Géricault pour parvenir à la réalisation de son immense Radeau de la Méduse, conservé au Louvre et qui est presque aussi mondialement connu que la Joconde.

De rétrospective de Géricault pourtant, il n'y en a eu que deux. La dernière au Grand Palais en 1991 et la précédente en 1924. Les publications autour de la Joconde se compte par milliers. Celles autour du Radeau de la Méduse se limitent à quelques dizaines et sont réservées à de grands érudits.

Il faut dire que l'œuvre est dérangeante à plus d'un titre. C'est un chef d'œuvre admiré et reconnu en tant que tel. Mais les naufragés égarés 13 jours en mer et soupçonnés par là de cannibalisme, n'ont évidemment pas la séduction de Mona Lisa

En plus, le sujet était politique. Parce que la frégate "La Méduse" avait surtout pour mission, bien davantage que de rallier le Sénégal, de débarrasser la royauté restaurée de quelques sujets encombrants et que Géricault, par-dessus le marché, en installant un Noir fort et courageux à l'extrémité du radeau, prenait position contre l'esclavage.

Le tableau, en revanche et aussi en raison de tout cela, est tout à fait fascinant. Parce qu'il est monumental et lumineux et que la musculature "michelangéslesque" des héros est réellement magnifique. En témoigne le pouvoir d'attraction sur le public de la reproduction grandeur nature (environ 5m sur 7) installée dans l'entrée du musée de Clermont-Ferrand, plus claire que l'œuvre elle-même dans son état actuel et sans doute plus proche aussi de ce qu'elle était en 1819. Elle a été réalisée à partir d'une photographie numérique à la très haute définition de 240 millions de pixels. 

Car il n'était pas question de déplacer l'original. Il n'y aurait pas résisté, sachant qu'il n'est même pas certain qu'il survive là où il est. Malgré plusieurs couches de vernis ou à cause de. Malgré les traitements de conservation, à condition que les remèdes ne soient pas pires que le mal.

Une connaissance précise de l'anatomie

L'occasion, en revanche, était de présenter le tableau réhabilité. Gerfant, ancien officier des armées impériales est un des personnages du radeau (à l'extrême gauche) , de même que certains élèves de Géricault et le tout jeune Eugène Delacroix qui figure au premier plan. Et l'opportunité de montrer le processus de création chez l'artiste et tout l'énorme travail préparatoire indispensable à une œuvre aussi monumentale.

On découvrira aussi l'univers de Géricault et ses obsessions. Des études de cadavres et de fragments anatomiques qu'il récupérait à l'hôpital Beaujon à côté de chez lui et que l'on faisait porter à ce drôle de client.

Il faut dire que Géricault, qui est mort à 33 ans, était atteint de tuberculose osseuse et que son masque mortuaire (présenté aussi) en dit long sur ses souffrances puisqu'il a l'aspect de celui d'un grand vieillard et peut aussi expliquer la fascination de ce qu'il appelait "ce je ne sais quoi qui n'a plus de noms dans aucune langue".

Doc vidéo Radeau de La Méduse
Et pourtant, le Radeau de la Méduse et ses études préparatoires, dont certaines n'auront pas servi à la représentation définitive, ce qui en fait aussi tout le prix, reste un immense chef d'œuvre. De nombreux musées français, mais aussi américains (New-York, Chicago…) et de grands collectionneurs anonymes ont prêtés la plupart des œuvres intermédiaires en complément de celles des collections maison.

On ne saurait que trop conseiller, en revanche, les visites commentées organisées par le musée qui permettent un regard plus documenté et plus riche pour vraiment l'appécier.

Cette exposition est incontournable en soi, mais aussi en ce qu'elle témoigne de l'aspect politique, dans le sens littéral du terme, de l'expertise en matière d'histoire de l'art et de l'intérêt, pour les spécialistes, de revisiter périodiquement les archives.

On y retrouve des trésors. Mais à l'inverse, on peut aussi être conduit à déclasser certaines œuvres que des techniques plus pointues font apparaître comme n'appartenant pas à des artistes auxquels elles avaient été attribuées à tort. L'ADN des œuvres en somme et le revers de la médaille.

Dessin, peinture et vitrail

Au chapitre des études préparatoires et du processus de création de l'artiste, on signalera aussi l'exposition "Auguste Morisot (1857-1951) - Du Crayon au Vitrail" au musée des Beaux Arts de Lyon jusqu'au 24 septembre. Plutôt méconnu, cet homme modeste à tous points de vue considérait le dessin comme le fondement de tous les arts et utilisait son entourage comme modèle et surtout lui-même pour perfectionner ses techniques.

Sa peinture vaut surtout en ce qu'elle a servi d'études préparatoires à des vitraux réalisés pour servir d'impostes dans son appartement de l'avenue Félix Faure et pour quelques clients privés. Le résultat est proche de l'Art Nouveau et il n'est pas exclu qu'il en existe encore, non répertoriés, dans certaines fermes du Jura où Morisot se rendait souvent. A la demande du couple Neyron de Champollon, de riches industriels qu'il avait comme clients, et aussi parce qu'il peignait là-bas les forêts comme des cathédrales.


jeudi 7 juin 2012

LES BIBS CHICS

On peut dire que le succès des BIB, les fameux BagInBox qui conditionnent les vins en carton de 3, 5 ou 10 litres a été fulgurant. Et pourtant, ce n'était pas gagné. On en concevait l'idée pour présenter les vins bon marché, mais certainement pas pour les grands crus. N'empêche, aujourd'hui, tout le monde ou presque s'y met…

Les rituels du vin - n'est chic que le breuvage présenté en bouteille - interdisait, ou à peu près, tout ce qui pouvait rappeler le vin en vrac. La "tireuse" de l'épicier ou du marchand de vins (et de charbon!) qui étanchait la soif des gros consommateurs en quantité, quand le gros rouge qui tache croyait sauver la France. La mode des barbecues et du vin au tonneau n'était pas plus convaincante.

On peut dire en revanche que c'est celle du vin au verre et son corollaire "boire peu mais bon " qui a emporté le morceau en créant un vrai marché pour l'excellence. D'autant, et c'est la clé du succès, que les outres contenues dans le carton des BIB sont remplies sous vide d'air et que, ainsi conservé à l'abri de l'oxygène et de la lumière, même les plus grands vins peuvent tenter l'expérience. L'offre chez les cavistes, dans la grande distribution et en direct dans les caves, se développe du coup à la vitesse grand V.

Grands Bordeaux, Côtes du Rhône et cépages rares…

Parmi les coups de cœur de l'année, la sélection des Côtes de Bourg , le Bob rouge 2009 choisi comme ambassadeur de l'AOC et sa version en blanc 2010. Sachant que les vignerons de l'appellation comme Château Puy d'Amour, Château Sauman qui assemble des jeunes Merlot, Château Grimard que l'on trouve à Carrefour s'y sont mis aussi. Il y a aussi un excellent Château Mercier 2008 rouge baptisé "L " comme Loisir et Liberté par la famille Chety  et grâce auquel on a l'impression de déguster tout le charme du domaine avec sa grande maison, son jardin potager, les chambres d'hôtes et la table de Martine dont les petits déjeuners sont un moment d'anthologie.

La Cave de Tain l'Hermitage, n'hésite pas à présenter ainsi d'excellents Crozes Hermitage rouges et des Saint Joseph tous 100% Syrah. A la cave de Rasteau sont proposés des Côtes du Rhône issus de Grenache noir, Cinsault et Carignan ou encore Syrah, des Côtes du Rhône Village et aussi des Vins de Pays de Vaucluse, dont on connaît les qualités qui peuvent n'avoir pas grand chose à envier à certaines appellations contrôlées.

En Ardèche, c'est le fameux cépage Chatus (en millésime 2006) qui donne des vins rouges grenat violacés avec des arômes multiples de pâte de coing, figue sèche, griotte, réglisse… qui est aussi conditionné en BIB à la Cave des Vignerons La Cévenole . Pas de problème de garde, au contraire. Et comme il est idéal sur les gibiers, il peut attendre la fin de l'automne… Dans le Sud Est, de nombreuses caves comme le Domaine de Régusse se sont lancées et les Vignerons du Roy René proposent les Vins de Pays Méditerranée dans les 3 couleurs.

On peut s'amuser à créer des collections de BIB en phase avec le tourisme. Très convaincus par la formule, les Vignerons Ardèchois proposent une collection "Villages de Caractère" illustrée de 7 œuvres d'inspiration cubiste par le peintre Robert Sgarra. Ils sont vendus chez les cavistes, mais je trouve personnellement très sympa de les prendre au caveau directement en sillonnant la région à la découverte des ravissants villages de Labeaume, Alba-La-Romaine, Antraigues, Balazuc, Banne, Saint-Montan et Vogüe. Pierre Champetier, président des IGP Ardèche, reconnaît lui-même que le volume des ventes en BIB est désormais supérieur au volume bouteille.

Le vin au verre au restaurant

Le Club Vignobles & Signatures rassemble 17 domaines familiaux de 17 régions de France et favorise le vin au verre au restaurant et non des moindres. Pour l'exemple, le Bistrot de Serine à Ampuis (69-Rhône) - qui a été racheté par 6 associés dont 4 vignerons (Cuilleron, Gaillard, Villard et Gerin) à Manu Viron, installé désormais à la Maison Borie à Lyon - affiche, au pays de la Côte Rôtie et du Condrieu, 400 références des meilleurs vins de la Côte du Rhône Septentrionale. L'Arpège à Paris, le restaurant du Meurice, la Brasserie Le Bibent de Christian Constant à Toulouse, de même que le fameux Espace PH3 de Patrick et Pascale Henriroux (la Pyramide à Vienne) en sont de fervents adeptes.

Le BIB est évidemment une ressource dans ce cas-là. Moins pour les restaurants qui vendent facilement une bouteille dans la journée que pour les particuliers qui aiment déguster modérément. Ce qui aura sans doute incité la maison Couly Dutheil qui a mis deux Chinon rouge et rosé en BIB et le Domaine Saint André de Figuière (deux IGP Var rouge et rosé), à développer le propos. Tous deux font partie du Club Vignobles & Signatures.

La tendance BIB, écologique, plus économique (le verre, c'est cher!), empilable, légère et incassable a non seulement de beaux jours devant elle, mais son fabuleux essor est pratiquement garanti. Pour que l'on puisse se régaler au verre de tous les vins y compris de haut niveau de qualité. La limite étant les vins très, très chers que personne n'achèterait bien sûr par 3 ou 5 litres.