lundi 21 décembre 2009

NOËL AVANT, PENDANT ET APRES



Noël a une telle importance en Provence, la célébration de l'anniversaire de la naissance de l'enfant Jésus est si ancrée dans les traditions que les fêtes qui entourent le 25 décembre (on les appellent les calendes) commencent parfois en novembre, toujours le 4 décembre avec la Sainte Barbe et durent au moins jusqu'en janvier avec les Rois et même jusqu'en février. Dans les familles provençales, il n'est pas rare que la crèche ne soit démontée que début février juste avant la Chandeleur. Après la crèche, les crêpes !

Il est donc encore temps de se remplir les yeux d'images de Noël en Provence. En suivant le Chemin des Crèches par exemple qui permet de découvrir les plus belles. Il faut savoir, avant tout, que la crèche est en fait une mangeoire et pas la figuration d'une étable. Mais en Provence, la crèche, c'est d'abord le village tout entier qui est représenté. Avec ses personnages emblématiques (tout le monde connaît "Lou Ravi", mais il y a aussi "Roustido" la bourgeoise et son parapluie rouge, l'ivrogne "Bartomiou" et le grand dadais "Pistachié"...), les métiers, les animaux, les pins et les oliviers.

Parmi les plus belles, il y a celle de Grambois qui est installée à partir du 22 décembre et reste dans l'église du village jusqu'au 5 février 2010. Sa particularité, c'est que les santons (qui sont l'oeuvre du santonnier Graille) sont à l'effigie des habitants du village. Certains prennent même la physionomie d'authentiques célébrités comme François Mauriac ou encore Paul Préboist (non pas Johnny..., pas encore).

En l'église de Saint-Saturnin-les Avignon, le spectacle des santons animés - qui mesurent entre 25 et 80cm de hauteur – , réalisés en carton, en pierre ou en cire du Carmel d'Avignon, se tient tous les après-midi entre Noël et le 4 janvier et tous les dimanches après-midi jusqu'au 1er février. A Valréas, la crèche occupe 57m2 du choeur de l'église Notre-Dame de Nazareth avec des santons très anciens qui mesurent de 3 à 120cm. Le départ du Chemin des Crèches se fait depuis Pernes-les-Fontaines avec une visite de la maison Fléchier et du musée du Costume Comtadin.

En matière de crèches, les familles provençales manifestent aussi beaucoup de créativité. Elles sont présentes dans chaque foyer et la coutume de la monter remonte à la Révolution. Peut-être parce qu'il n'était pas toujours prudent, en ces temps tourmentés, de se rendre à l'église. Pour se recueillir et pour prier, on construisait le Bon Dieu chez soi. Peut-être...

Mais pour s'inspirer, en dehors des ateliers de nombreux artisans santonniers où l'on peut se procurer les personnages petit à petit (une crèche familiale fait partie de l'héritage provençal...), on peut aussi visiter le Musée du Santon à Fontaine-de-Vaucluse. Il rassemble le travail d'une centaine de santonniers dans toute la Provence et présente plus de 60 crèches différentes et quelques 2000 personnages et automates. Reste que l'on pourra profiter d'un séjour dans la région du Vaucluse pour assister à une messe de minuit. Une tradition qui remonterait au Vème siècle et qui vaut, en dehors de son aspect religieux, pour les "Noëls", ces cantiques en langue provençale qui accompagnent les traditions comme le pastrage (offrande d'un agneau par les bergers).

Après, il ne faut pas manquer le fameux Gros Souper et les 13 desserts. De nombreux restaurants le proposent pendant tout le mois de décembre, à la manière d'une curiosité. Mais le soir de Noël, qui est par essence une fête de famille, il est rare que les restaurants s'immiscent dans l'intimité. Sauf à être invité chez les Provençaux, on n'en connaîtra pas les émois. Reste que l'on peut, chez soi et n'importe où en France ou ailleurs proposer à la fin du repas le nougat blanc et noir, la fougasse, les fruits confits, les dattes, les mandarines, les mendiants (noix, amandes, figues sèches et noisettes), raisins, pommes et pruneaux. Pour le nougat, on peut même apprendre à le confectionner soi-même avec Rose dans une ferme du village de Sarrians. Je vous en parlerai une autre fois.

Avec l'Epiphanie début janvier, la fête n'est pas finie. Il faut savoir tout d'abord qu'en Provence, on ignore à peu près la galette feuilletée. C'est dans une brioche aux fruits confits en forme de couronne que la fève est cachée. Autrefois, le boulanger l'offrait même à ses fidèles clients pour leur étrennes. La coutume est un peu passée de mode. A moins que la tradition n'ait été remplacée par la promotion (2 pour le prix d'une ou quelque chose dans le genre...)

Les Mystères de Noël, au sens médiéval du terme, s'appellent ici Pastorales. Parmi les plus célèbres (on en trouve même des enregistrements en DVD), il y a la pastorale Maurel à laquelle on peut assister à Robion le 10 janvier et la Pastorale l'Oulo d'Arpian le 17 janvier à Châteauneuf-de-Gadagne.

Après les fêtes, la Provence ne s'endort pas. C'est la meilleure saison pour les truffes (bien mieux que novembre et même décembre). Elles sont enfin mûres et les festivités qui les entourent commencent. Je vous en reparlerai donc.

Je vous dirai un mot aussi de la nature sauvage du Jura et de ses étonnants vins jaunes et je vous emmènerai chez l'incontournable Nicolas Le Bec qui a installé son restaurant entouré de commerces de bouche et baptisé "Rue Le Bec" dans le nouveau quartier de la Confluence à Lyon. Il fourmille de projets. A Paris, dans le quartier de l'Opéra et en Provence aussi justement. D'ici là, à tous et à toutes, joyeux Noël et bonne année !

mercredi 9 décembre 2009

BALADE A VONNAS



En cette fin novembre, j'ai rendez-vous, non pas au village du Père Noël, mais au Village Gourmand de Georges Blanc à Vonnas (01 - Ain). Parti de l'auberge de sa grand-mère (qu'il va reconstituer sous le nom d'Ancienne Auberge quand il aura conquis tous les lauriers et ses 3 macarons), le plus bourguignon des étoilés de la région de Lyon, a bâti presque un empire, qu'il a fait agrémenter, d'une sortie d'autoroute et d'un parcours soigneusement fléché jusqu'à lui. On a parlé d'influences politiques. Sans doute...

Ces cuisiniers d'exception reçoivent à leur table tous les grands de ce monde. Les Présidents de la République comme Mitterrand, Chirac, Giscard et les grands dirigeants de la planète. A l'occasion du G7, Helmut Kohl et Bill Clinton ont dégusté la "poularde de Bresse comme au G7" qui figure toujours à la carte.

A considérer la galerie de portraits qui couvre les murs du salon et court le long du couloir qui mène à la salle à manger en longeant les cuisines le long de la Veyle et de ses bords fleuris, on admire les autographes et compliments des gloires du cinéma, Alain Delon, Romy Schneider et des célébrités de toute nature. Pas étonnant alors qu'il suffise de demander quand on a besoin de quelque chose et que vous avez celui qui peut vous le donner sous la main. Certains y pensent sans même qu'on y fasse allusion pour peu que leur chauffeur se soit un peu perdu sur les routes de la Bresse...

Et il y les amis des amis. A peine embarqués dans les camions caméras et éclairages du "Goûtez-voir" d'Odile Mattéi auquel je participais et qui sera diffusé le dimanche 13 décembre à 11h30 sur France3, que PPDA déposait ses valises à la réception. Encore un homme de goût !

Ce jour-là, j'ai eu un peu de mal à m'approcher du "village". Les travaux fermaient les rues qui mènent au restaurant, en passant devant le Musée initié par Georges Blanc il y a quelques années en hommage à la tradition de carrosserie du village et le jeudi, justement, c'est aussi jour de marché. Il était presque difficile de se garer sur la place. Ce qui est un comble à la campagne.

Je vais donc jusque devant la Résidence des Saules, l'hôtel 3 étoiles qui permet de séjourner au Village Gourmand à des tarifs plus démocratiques et de profiter de la boutique, la cave, la boulangerie qui s'alignent sur tout un côté de la place. Dieu merci, il y a aussi la cour de "la Cour aux Fleurs", l'hôtel 5 étoiles aux chambres somptueuses et chaleureuses meublées d'authentiques armoises bressanes, de crédences et autres objets précieux chinés dans les fermes environnantes. C'est là aussi qu'est installé le fameux SPA Mosaïc, une merveille ouverte sur la nature, si accompli qu'il a reçu le Spa Trophy 2009 qui récompense le plus beau Spa au monde de la chaîne Relais Châteaux parmi 146 établissements situés dans 28 pays !

Démonstration, s'il en était besoin, du perfectionnisme du chef. Il à l'oeil à tout. Se rend compte que l'une des personnes, qui figure sur une simple photo souvenir, a le soleil dans l'oeil, joue les assistants de production, en homme d'expérience sur le tournage et s'y épanouit comme un poisson dans l'eau. Il faut dire qu'il est habitué des plateaux télé. On ne compte plus les émissions tournées au restaurant, dans les vignes du Mâconnais où il est propriétaire du Domaine d'Azenay qui produit d'excellents blancs tout à fait dignes de figurer dans la cave du restaurant qui est une des plus belles du monde.

Il se déplace aussi et, expression encore du perfectionnisme de Georges, ne se lance dans aucune aventure sans s'attacher à la gagner. Il coachait Grégory Cuilleron dans l'émission de M6 "Un Dîner presque parfait" et c'est lui (enfin eux) qui a gagné. Que l'on se balade à sa suite pour visiter l'hôtel et on le voit s'impatienter en redressant un tableau qui penche un peu (ça se voyait à peine, mais à la réflexion si !), protester parce que les lampes "brûlent" le jour dans les couloirs et qu'il n'aime pas le gaspillage.

Et mettre bien sûr son grain de sel en cuisine, quand il n'est pas lui-même aux fourneaux, même s'il est formidablement secondé. Cet hôtel restaurant de province qui vendait des grenouilles et du poulet à la crème autrefois est désormais une PME florissante (elle est passée dans Capital) avec son DRH, Marcel Périnet, arrivé dans la maison pour faire la plonge au début de sa toute jeune carrière et qui a gravi tous les échelons.

Cette rigueur pourrait nuire à la créativité du chef. En fait, pas une seconde et tout son art réside dans le fait que le grand Georges est un amoureux des produits. Pour lui, goût naturel et fraîcheur sont primordiaux et le poulet de Bresse qu'il défend bec et ongles ;) en occupant la fonction de président du CIVB (Comité International de la Volaille de Bresse , c'est simplement rôti qu'il le préfère, même s'il l'a déjà accommodé à de multiples sauces. Toujours réussies. Evidemment, il participera aux Glorieuses de Bresse, ces 4 marchés aux volailles grasses et chapons qui se tiennent juste avant Noël dans toute la région de la Bresse, mais cet homme qui a fait de son domaine d'excellence un lieu à la fois élégant et luxueux, essaie toujours de cultiver la simplicité.

Il a déjà publié plus d'une quinzaine de livres de cuisine. Mais, précise-t-il, pas question de s'atteler à des ouvrages luxueux qui n'ont pas leur place dans une cuisine et ne quittent guère la table du salon. Ces recettes à lui sont accessibles et le luxe, c'est le produit. Dans le dernier paru justement baptisé "Le plus simple du meilleur" aux Editions Minerva, il cuisine 25 produits d'exception soigneusement choisis et mis en valeur de la façon la plus simple qui soit. Il y a le bar de ligne et les langoustines, les huîtres et les artichauts poivrade, les volailles de Bresse et les oeufs évidemment, mais aussi l'agneau, les figues et les fraises. Entre autres...

Avec des conseils pour les choisir au mieux, les diverses origines et les saisons d'élection au cours desquelles il convient de les consommer. Quelques questions-réponses avec Sylvia Gabet, co–auteur et cuisinière du quotidien et bien sûr les tours de main et les vins à associer au plat. A la veille des fêtes, je viens d'en essayer plusieurs. J'ai déjà réalisé le homard et son coulis mêlé de pennes, le risotto aux morilles et safran et une volaille rôtie en deux temps avant de passer au chapon pour les fêtes et à la soupe de haricots cocos à la truffe noire. Pour finir, des fruits façon tiramisù, mais pas des fraises comme proposé dans le livre, on attendra le printemps !