jeudi 5 mars 2009

CRITIQUES GASTRONOMIQUES

L'escalier de la Mère Brazier - © DiogeneLaerce / Flickr - Licence Creative Common (by-nc-sa)

Les meilleurs critiques, c'est vous, c'est moi, c'est nous, qui nous rendons au restaurant et réglons notre addition! Si l'on en croit les professionnels, la qualité essentielle d'un critique gastronomique, c'est de payer sa note.
Peu importe qu'on n'y connaisse rien, peu importe que l'on s'émerveille devant n'importe quelle soupe, que l'on soit prêt à tomber en admiration devant la pizzeria du coin qui dégèle tous les ingrédients et à vilipender des cuisiniers de métier parce qu'on n'a pas la culture qui permet de comprendre. On paie, donc on a raison !

C'est une cabale qui fait rage depuis des lustres. Les chroniqueurs gastronomiques s'envoient les additions non réglées à la figure, exhibent les invitations qui valent une bonne critique dans un journal. Tous jurent la main sur le coeur qu'il paient partout où ils vont. On compare avec la critique de théâtre et de cinéma où séances et projections sont gratuites pour la presse. Avec la critique littéraire (les chroniqueurs reçoivent les ouvrages et les éreintent si bon leur semble...) et toute autre forme de journalisme du genre.

Il n'y a pas si longtemps, c'est François Simon, le chroniqueur du Figaro, anonyme entre tous (le masque de Tintin, c'est lui...) qui se faisait épingler dans un quotidien d'outre-Atlantique. Le monde de la restauration et ce qui l'entoure n'est pas tendre. Un jour, je vous raconterai... C'est le même François Simon dont je partage l'avis, consigné dans son blog à propos de la dernière livraison du Guide Michelin.

Un cru "quelconque" de son point de vue. Dans la droite ligne de celui de l'an passé que j'avais moi-même qualifié de "mou" et de convenu. Simon évoque un "marketing poussif" à propos des étoiles de Fréchon au Bristol, de Roth au Ritz. Je partage entièrement son avis. N'accèdent plus aux sommets gastronomiques que les restaurants à gros moyens. C'est à dire nichés dans des hôtels parisiens, eux-mêmes propriété de grands groupes qui peuvent se permettre d'entretenir un personnel pléthorique autour de chefs traités comme des stars du football, avec les salaires qui vont avec. Manquerait plus qu'ils ne fassent pas bien avec ça.

Le problème est le même avec les concours. Je l'ai déjà évoqué à propos du Bocuse d'Or. Qui a les moyens de laisser un chef s'entraîner à réaliser les plats imposés et ceux de lui offrir une brigade qui fait le boulot à sa place pour les clients. Pendant ce temps-là, les vrais gourmands sont à la recherche d'autre chose. De restaurants à tarifs normaux dans lesquels la clientèle ne se limite pas aux hommes d'affaires du CAC 40, aux directeurs de cabinet, ministres et diplomates qui ne se rappelleront jamais de ce qu'ils ont mangé, leur tête étant à autre chose.

Une troisième étoile au Bristol donc. Fréchon qui a pour clients le Président de la République (voir ci-dessus) n'a pas démérité. Pendant ce temps-là, les rangs se dégarnissent avec la fermeture des Maisons de Bricourt d'Olivier Roellinger à Cancale (35 – Ille-et-Vilaine) et de la Maison de Marc Veyrat à Annecy (74 - Haute-Savoie).

La lyonnaise que je suis se réjouit sincèrement des 2 étoiles de la Mère Brazier, tenue désormais par Mathieu Vianney qui n'en avait qu'une dans le restaurant qui portait son nom. Un lieu chargé de tant de mémoire ne pouvait pas sombrer dans l'oubli ou en de mauvaises mains. Mais l'établissement de la rue Royale a eu chaud ces dernières années. De même, la seconde étoile de Guy Lassausaie à Chasselay. Peut-être le meilleur rapport qualité-prix de la région lyonnaise. Il était temps !

Mais là où le Michelin se rattrape, ce n'est pas avec la distribultion de distinctions haut de gamme. Il existe désormais 527 adresses qui sont gratifiées d'un Bib Gourmand, c'est à dire presque autant que de restaurants étoilés (548). Et quand on sait que c'est d'abord ce genre d'établissements que recherchent les clients qui souhaitent bien manger pour une addition d'une trentaine d'euros (35 euros à Paris), c'est plutôt une bonne nouvelle ! Sinon que les Bib gourmands ne sont pas tous aussi modiques.

Léon de Lyon, un autre "déserteur" de la grande gastronomie et autrefois doublement étoilé, est gratifié d'un Bib Gourmand pour sa Brasserie Léon de Lyon installée et repensée dans les mêmes lieux. Mais là , même si qualité et élégance sont réunies, on est tout de même plus proche des 45-50 euros que des 30. Ce qui fait tout de même une différence !

Avec sa 100ème édition, le Guide Michelin, converti au marketing, crée l'événement une seconde fois après le 100ème anniversaire en l'an 2000. Il profite du fait que le guide n'est pas sorti pendant les 2 guerres mondiales pour fêter deux fois le chiffre 100. Et instaurer un "Mois Gourmand" avec force promotions du 9 mars au 5 avril. Business is business !

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