lundi 12 mai 2008

C'EST BON, C'EST BRETON

Yvon Madec, le pape de la Prat-Ar-Coum, une huître incomparable !L'avion est archi plein au départ de Lyon Saint Exupéry* ce lundi matin. Des voyageurs qui se rendent à Brest pour quelques jours ou la semaine, quelques vacances (ce sont celles de Pâques...) et, au fond, tout plein de gens qui sont natifs de Bretagne ou amoureux d'adoption et qui se rendent en Finistère.

Il va falloir faire attention, les bretons sont ombrageux et n'admettent pas facilement que le Finistère et les Côtes d'Armor, le Morbihan et, pire, l'Ile et Vilaine et Rennes, la capitale, à moitié parisienne, soit vraiment de la même trempe. On verra même plus avant qu'il ne faut pas mélanger les habitants originaires de Batz avec les autres. Pour les Finistériens, les îles du Ponant (c'est à dire les îles de l'Ouest) se limitent aux leurs. Gaffe à la gaffe !

C'est amusant, car, dans l'avion du retour, tout aussi plein ( un mercredi pourtant...), je me prends à réfléchir au "contraste de plus en plus flagrant entre les hymnes récurrents à la globalité et le provincialisme têtu" comme le dit Jean Claude Guillebaud dans Télé Obs "la mondialisation, paradoxalement, n'en finit pas de nous tribaliser". Plus simplement, on est Finistérien et on y est bien, parce qu'on s'adapte. On est Breton pour les mêmes raisons et si on se replie sur ses coutumes et son communautarisme en voulant seulement rester français d'un autre coin, on n'est pas sauvé ! Et on risque fort de se pourrir la vie sur place.

Mon voisin est d'Aix en Provence et se réjouit de la victoire de Marseille en championnat de foot, mais comme on est bien élevé, on ne s'étend pas sur le sujet. Il n'a jamais mis les pieds en Bretagne et me demande ce qu'il y a de bon là-bas et quelles sont les spécialités. C'est le moment de réviser mes classiques... Tout ce que je trouve à bredouiller, c'est qu'il ne faut pas manquer le kouign amann (littéralement "gâteau au beurre" qui ne vole pas son nom). J'en ai goûté d'excellent à Locronan au cours d'un précédent voyage et une seule part devrait pouvoir suffire pour oublier la faim toute une semaine.

Je ferai d'autres expériences, bien moins concluantes dans quelques crêperies du nord Finistère qui s'y essaient. Réchauffé au micro-ondes, donc ramolli, suant le beurre, il n'est pas bon partout où on le sert. Mais c'est comme ça pour tout. On sera donc bien inspiré de le déguster chez des fabricants estampillés par l'association.

Evidemment, il faut goûter les crêpes. Personne ne les réussit comme là-bas et celles dégustées au Conquet valident mon propos. Et puis, il y a les crustacés et les fruits de mer. Je garderai longtemps dans l'œil, davantage encore qu'en photo, le monstrueux plateau du restaurant Vioben qui ne sert que cela. Le papa est pêcheur, Vio et Ben, ce sont les premières lettres du prénom des enfants et c'est la fille, Violette, qui sert au restaurant. Elle a commencé sa carrière chez L'Oréal et s'est vite reconvertie dans les huîtres, homards et langoustes impressionnants. Elle a bien fait.

Dans le pays des Abers, c'est après une visite chez Michel Izard, boulanger de compétition à Lannilis, et célèbre jusqu'à Paris que l'on se rend chez Yvon Madec, le pape de la Prat-Ar-Coum, une huître incomparable qui a les honneurs de toute la presse gastronomique (les coupures sont affichées sur les murs de la grande salle où sont entreposés les viviers). Yvon Madec la fait déguster avec un Muscadet Grand Mouton de Louis Métaireau vieilli dans les eaux de la rade de Brest.

Personne n'oserait les arroser d'un jus de citron tant elles sont exquises à gober dans leur naturel. Tout l'été sur la terrasse du parc, on fait aussi des orgies d'excellents homards reconnus comme les meilleurs du monde (les Canadiens le reconnaissent et posent un genou en terre). Mais ce n'est pas une raison pour croire sur parole, la charmante jeune fille qui nous fait visiter le phare de l'Ile de Batz et prétend que, du homard, ils en ont par-dessus les yeux dans la famille tant ils en ramènent de la pêche. A ce prix-là, évidemment qu'ils le vendent ! Ou alors, ils sont tombés sur la tête !

A l'Auberge de Meneham à Kerlouan, délicieux village de pêcheurs, on dégustera un filet de lieu exceptionnel et une meringue italienne avec des fraises de Plougastel, délicieusement parfumées que l'on n'est pas près d'oublier. Et comme le Finistère a aussi ses grandes maisons, on se régalera à Roscoff au Temps de Vivre et au Brittany, étoilés Michelin. Ce dernier nous servira même une variation sur l'artichaut au dessert. Pourquoi pas...

Le kig ha farz (pot au feu breton), sur le marché de Roscoff.Mais pourquoi pas aussi, le "kig ha farz", le pot au feu breton que des marchands ambulants proposent même sur le marché de Roscoff. Direct dans la marmite, mais aussi en conserve et à emporter. Et à propos d'emporter, il faut foncer dans les magasins Roi de Bretagne où l'on peut faire provision des Connétable, les formidables sardines de Douarnenez, de pâté de porc Henaff, de caramels au beurre salé et autre exquises et locales gourmandises. Dommage que je n'ai pas retrouvé mon voisin dans l'avion du retour, j'aurais pu lui raconter !

(*) On peut se rendre, là "où finissent les terres" (littéralement Finistère) à Brest depuis de nombreux aéroports français et britanniques : Paris, Nantes, Lyon, Marseille, Nice, Toulon, Londres, Birmingham, Southampton et Exeter. Et en bateau de Plymouth, Rosslare ou Cork vers Roscoff. On peut aussi utiliser sa petite auto et musarder jusque là en prenant son temps. Ce qui est plus commode pour rapporter conserves et artichauts...

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